Il était dix-sept heures trente. Elle n'avait aucune idée des heures d'ouverture de la boutique de Mirabella et essaya de rappeler, au cas où.
Ça sonnait dans le vide.
Cassie se demandait si son numéro s'affichait quand elle appelait, Mirabella ne répondait peut-être pas voyant qu'il s'agissait de Cassie.
La boutique avait peut-être fermé plus tôt que d'habitude.
Quoi qu'il en soit, Cassie était incapable d'avaler la nouvelle annoncée par cette femme ce matin. Elle ne pouvait croire à la mort récente de sa sœur. Elle sentait, au fond, qu'elle était vivante. Mirabella avait peut-être commis une erreur, elle pensait peut-être à une autre Jacqui. Elle avait peut-être inventé cette histoire pour protéger sa sœur d'un petit ami violent, échapper au fisc, la cacher face à une quelconque menace.
Si Cassie ne parvenait pas à joindre Mirabella au téléphone, elle se rendrait sur place et lui parlerait de vive voix. Elle était convaincue que la femme ne pourrait pas lui mentir, ce qui laisserait à Cassie le temps nécessaire pour découvrir la vérité.
Cassie calculait le temps qu'il lui faudrait pour aller dans cette ville, située à deux bonnes heures de route du lieu actuel, lorsqu'on frappa à la porte.
"Entrez,“ elle réalisa que la cuisinière ne la comprenait peut-être pas.
Elle se leva mais la porte s'ouvrit avant qu'elle l'atteigne.
Elle s'attendait à voir la cuisinière, Mme Rossi se tenait devant la porte avec un plateau recouvert d'une cloche en argent.
Cassie recula alors qu'elle pénétrait dans la chambre.
Mme Rossi referma la porte derrière elle et posa le plateau sur le bureau.
Elle prit place sur l'un des deux fauteuils capitonnés dorés disposés à l'angle et fit signe à Cassie de faire de même.
"Asseyez-vous je vous prie. Nous avons à parler."
Bien que l'invitation soit formulée courtoisement, Cassie tremblait de nervosité, assise au bord du fauteuil rococo.
Cette femme d'affaires influente l'intimidait. Se mettre à mal avec elle était plus grave que se faire remonter les bretelles par une personne ordinaire. Cassie aurait dû s'en douter, ou du moins demander la permission avant de jouer avec les enfants. Elle était désemparée sous le regard sévère de Mme Rossi, comme si elle n'était pas capable de faire ce qu'on attendait d'elle.
"Je ferai preuve de patience," dit posément Mme Rossi, "je crains que vous n'ayez pas bien compris."
"Non. Non, je suis sincèrement désolé," Cassie présenta ses excuses avec empressement.
"Mes filles mènent une vie différente de celle à laquelle vous êtes habituée. Nous vivons dans un monde très différent du vôtre. Les jeux d'enfants n'ont pas de place dans leur vie."
"Je voulais qu'elles s'amusent un peu," murmura faiblement Cassie en une tentative pathétique de se justifier.
"Vous ne semblez pas comprendre. Mes filles s'amusent, mais autrement. Elles aiment le chant et les promenades à cheval."