« Je suis triste de quitter ma maison, moi aussi, » dit-il gentiment.
« Jai tellement hâte, » sexclama Maili innocemment. « Nous allons vivre dans un château, avec des bals et de jolies robes ! » Ses yeux étaient écarquillés et ses boucles rebondissaient de manière charmante.
Gavin eut un petit rire. Oh, comme il serait bon de voir le monde comme un enfant.
« Je ne suis pas sûr de cela, ma petite. Peut-être quand vous serez plus âgée. » Il se pencha et ébouriffa affectueusement une de ses boucles.
Maili fit une moue adorable, et il limagina en jolie jeune fille ayant des vingtaines de prétendants. Il redoutait ce jour. Catriona montrait déjà des signes de maturité et il savait que son temps viendrait sous peu. Il réalisa que les filles auraient besoin dune gouvernante pour les aider dans leur éducation en tant que dames et se fit une note, intérieurement, de mettre une petite annonce en recherchant une lorsquils seraient arrivés au Château Craig.
Maili bondissait de fenêtre en fenêtre et de siège en siège, escaladant quasiment les murs du carrosse comme un singe en cage que Gavin avait un jour vu. Elle nétait jamais calme, chantant ou papotant toujours. Il était certain quelle le garderait bien occupé, pensa-t-il. Il navait pas remarqué son enthousiasme auparavant, mais il ne sétait pas retrouvé avec elle dans un si petit espace pour de longues périodes. Seamus et Catriona étaient des enfants bien plus calmes.
Dun seul coup, Maili grimpa sur ses genoux pour lui faire un câlin. Plus tôt, Catriona sétait endormie sur son épaule. Peut-être devraient-ils sarrêter pour la nuit. Lorsquil était seul, il ne sarrêtait jamais, impatient dêtre chez lui et nétant pas fervent des auberges de bord de route. Il devrait adapter sa façon de penser, maintenant quil était père. Il préviendrait le cocher de ce changement de plan la prochaine fois quils sarrêteraient pour changer les chevaux.
Alors quils sapprêtaient à sarrêter à côté dune auberge, une Maili ensommeillée leva ses grands yeux gris vers lui.
« Papa Craig, quand aurons-nous une maman ? »
Sa gorge se serra quand il lentendit lappeler Papa. Il jeta un coup dœil vers Catriona, qui lobservait avec des yeux remplis despoir, attendant la réponse à la question. Son cœur se serra dans sa poitrine.
« Je ne sais pas, ma petite. Je navais pas pensé prendre une épouse. »
Maili fronça les sourcils et replaça sa tête sur sa poitrine. Catriona détourna les yeux, déçue.
Le cœur de Gavin salourdit, et il espéra que les filles seraient assez heureuses avec lui. Fut un temps, plusieurs années auparavant, il avait rêvé davoir une femme et sa propre famille. Il avait toujours voulu une maison pleine denfants, quil adorait. Il était tombé amoureux une fois, rapidement et profondément, mais à léchec de la relation, il avait renoncé à lamour et au mariage. Pendant longtemps, cela avait été trop douloureux dy penser, mais il avait enfin limpression davoir atteint une certaine satisfaction. Cela ne voulait pas dire quil souhaitait à nouveau sy soumettre. Il focaliserait son amour sur ces enfants.
Alors quils sarrêtaient à lauberge, le carrosse fit une embardée, et Maili, contre toute attente, se mit à répandre le contenu de son estomac sur lui. Il soupira.
« Maili ! Je tai dit de ne pas manger toutes les dragées que Mme Millbanks tavait données ! » gronda Catriona.
Maili leva les yeux vers Gavin, honteusement. Il était très dur dêtre en colère face à petit visage.
« Je suis désolée, Papa Craig. Je ne le referai plus. »
« Jespère alors que vous avez appris votre leçon. Arrêtons-nous pour la nuit afin de manger, faire notre toilette et dormir. »
Après avoir accompagné les filles jusquà leur chambre avec leur nourrice et leur avoir commandé un dîner servi dans leur chambre, Gavin enfila une tenue propre et se rendit jusquau petit salon pour trouver à dîner et profiter dun peu de temps pour lui. Il allait également devoir shabituer à ce nouveau mode de vie. On lui montra où était le salon, mais il fut surpris dy voir quelque de familier déjà assis.
« Lord Ashbury », dit-il alors que le Marquis se levait pour le saluer.
« Lord Craig. Je suis ravi de vous revoir. » Ashbury lui tendit la main et serra celle de Gavin.
Gavin avait fait la rencontre de Lord Ashbury et sa famille lorsquils avaient visité le prieuré dAlberfoyle quelques années auparavant. Lord Vernon courtisait alors lune des filles triplettes du Marquis, Lady Margaux. Elle aussi avait été déçue lorsque Lord Vernon sétait marié avec Lady Béatrice. Mais Margaux était probablement mariée à quelquun dautre à cette heure-ci.
« Vous avez entendu la nouvelle, alors ? » demanda Gavin, surpris dêtre appelé par le titre de son frère.
« Oui. Mes condoléances. Vous joindrez-vous à moi ? Mes compagnons sont partis se coucher. » Ashbury désigna la table de la main. « Vous ne le savez peut-être pas, mais je connaissais votre père lorsque jétais enfant. Jai passé la majorité de ma jeunesse dans un domaine à proximité du Château Craig, et jai récemment bien appris à connaître votre frère. Lady Ashbury préfère vivre en ville, ou en France, nous sommes donc rarement en Écosse. Jai récemment ouvert un foyer pour jeunes filles dans le douaire du domaine, et nous y passons de temps en temps. Nous sommes en ce moment même ici pour une courte visite, bien que jy passerais volontiers lété tout entier. »
« Voulez-vous dire Breconrae ? Je me souviens vaguement que le propriétaire du domaine avait pour nom Ashbury. Je me souviens quune douairière y résidait quand jétais enfant. »
« En effet, ma mère. Elle est décédée depuis, mais une tante y vit toujours. Allez-vous au château seulement maintenant ? »
Gavin secoua la tête. « Je suis retourné à Alberfoyle. »
« Ah, oui. Jimagine que fermer votre cabinet et déménager prend du temps à organiser. Pouvez-vous vous joindre à nous pour diner la semaine prochaine ? Lady Ashbury sera déçue dapprendre quelle vous a manqué ce soir, mais aura ma peau si je ne massure pas de vous avoir à dîner. Une soirée calme, je vous le garantis. »
« Jen serai honoré, merci. »
La groupe des Craig était à nouveau sur la route tôt le lendemain, impatients darriver au château tant quil faisait encore jour. Les collines ondoyantes et les vallées étaient parsemées de moutons broutant, et les chemins étaient étroits et escarpés. Les filles retinrent leur respiration plusieurs fois tandis que le carrosse montait puis descendait rapidement. La dernière partie du voyage, qui durait un certain temps, se faisait le long du fleuve Clyde, avant quils ne passent finalement par lénorme portail en fer du domaine Craig. Ceci était létape du voyage où, habituellement, Gavin exhortait son cheval vers lavant, impatient de saluer sa famille.
« Sommes-nous bientôt arrivés, Papa Craig ? » demanda Maili pour la centième fois.
« Presque, ma petite. Nous sommes sur la propriété désormais, » dit-il avait patience. « Quand nous serons arrivés, nous traverserons un grand pont en pierre. »
« Tout ceci est à vous ? » demanda Catriona, les yeux écarquillés. Les deux filles regardaient avec fervent intérêt par la fenêtre.