Коллектив авторов - Европейская аналитика 2018 стр 5.

Шрифт
Фон

En 1993, M. Mitterrand soffusque de ladhésion des pays de lEst à lOTAN, une alliance quil voulait voir devenir plus politique, moins militaire. Aux États-Unis aussi, quelques voix sélèvent très tôt pour alerter des dangers dune telle dynamique. Elle risque de produire chez la Russie la réaction nationaliste quelle est censée prévenir. Même le père de la doctrine de lendiguement de lexpansionnisme soviétique en 1946, George F. Kennan, dénonce dès 1997 lélargissement de lOTAN comme la plus fatale erreur de politique américaine depuis la guerre. Cette décision de lOccident, prévient lancien diplomate, va porter préjudice au développement de la démocratie russe, en rétablissant latmosphère de la Guerre froide <>. Les Russes nauront dautre choix que dinterpréter lexpansion de lOtan comme une action militaire. Ils iront chercher ailleurs des garanties pour leur sécurité et leur avenir. Critique de lhubris américaine, M. Jack Matlock, lambassadeur des États-Unis en Union soviétique entre 1987 et 1991, note que trop dhommes politiques américains voient la fin de la guerre froide comme sil sagissait dune quasi-victoire militaire. <> La question naurait pas dű être élargir et non lOTAN mais plutôt dexplorer comment les États-Unis pouvaient garantir aux pays dEurope centrale que leur indépendance serait préservée et, en même temps, créer en Europe un système de sécurité qui aurait confié la responsabilité de lavenir du continent aux Européens eux-mêmes16.

Dans les années 1990, affaiblie par le chaos économique et social, la Russie na guère les moyens de défendre ses intérêts géopolitiques. Mais la timidité de sa réaction tient aussi à sa volonté de préserver son statut de grande puissance en tant que partenaire privilégié des Américains. Or, sur ce point, les Occidentaux ont laissé à la Russie quelques raisons despérer. Moscou a récupéré son arsenal nucléaire dispersé dans les anciennes républiques soviétiques avec la bénédiction de Washington; elle conserve son siège au conseil de sécurité des Nations; elle se voit offrir de siéger dans le club des grandes puissances capitalistes, le G7. Il régnait à lépoque une atmosphère deuphorie, se rappelle lancien vice-ministre des affaires étrangères (19861990) Anatoli Adamichine, nous pensions être dans le même bateau que lOccident17. Les dirigeants russes ne présentent pas tout . de suite lélargissement comme une menace militaire. Ils sinquiètent plutôt de leur isolement, quils sefforcent de prévenir en avançant une série de propositions18. Boris Eltsine formule dès décembre 1991 le souhait que son pays rejoigne lorganisation à long terme. Son ministre des affaires étrangères russe Andreï Kozyrev évoque la possibilité de subordonner lAlliance aux décisions à la CSCE (en passe de devenir lOSCE).

Lintervention de lOTAN en ex-Yougoslavie en 1999, hors de tout mandat des Nations unies, fait prendre à la Russie la mesure de sa relégation stratégique. LAlliance atlantique, dont elle est exclue, lui apparaît alors comme le bras armé dun camp vainqueur, tellement assuré de sa force quil entend limposer, y compris en dehors de sa zone. Le bombardement de Belgrade par lOTAN [en 1999] a suscité une très grave déception pour ceux qui, comme moi, croyaient dans le projet de la maison commune européenne, nous confie Youri Roubinski, premier conseiller politique à lAmbassade de Russie à Paris entre 1987 et 1997. Lélan vers lEurope impulsé par Gorbatchev a cependant continué dexercer sa force dinertie positive de nombreuses années.

Il est généralement admis que larrivée dun ancien agent des services secrets russes à la tête de lÉtat russe en 2000 marque une rupture par rapport aux années Eltsine, présentées comme plus ouvertes sur lOccident et plus démocratiques. Cest oublier que le premier mandat de M. Poutine commence sur une initiative très europhile. En 2001, depuis la tribune du Bundestag, il appelle lEurope à unir ses capacités au potentiel humain, territorial, naturel, économique, culturel et militaire de la Russie. La même année, après les attentats du 11 septembre, la Russie propose une coalition contre le terrorisme, inspirée de celle qui a vaincu les nazis durant la seconde guerre mondiale. Mais en décembre de la même année, les États-Unis de nouveau en quête de supériorité militaire annoncent quils sortent du traité sur les missiles antimissiles (ABM) signé par Brejnev et Nixon en 1972.

En février 2007 à Munich, M. Poutine fustige lunilatéralisme américain: On veut nous infliger de nouvelles lignes de démarcation et de nouveaux murs. En 2008, il lance ses troupes pour bloquer loffensive du président géorgien contre lOssétie du Sud et contrecarrer indirectement une extension de lOtan dans le Caucase. Mais il ne renonce pas au dialogue et propose même en novembre 2009 un traité de sécurité en Europe. La proposition est ignorée.

Rejetée aux marges de lEurope, la Russie poursuit, de son côté, son projet dintégration économique régionale avec danciennes républiques soviétiques centre-asiatiques et caucasiennes (Kazakhstan, Kirghizstan, Tadjikistan puis Arménie) et la Biélorussie. Mais là encore, Moscou ne cherche pas à tourner le dos à lEurope, son premier partenaire commercial et principale destination de ses exportations de gaz. Grâce à ce projet, la Russie pense au contraire pouvoir négocier en meilleure posture un partenariat avec lUE à condition dintégrer lUkraine, pièce maîtresse de son édifice. Moscou accuse aujourdhui lUnion européenne de lavoir exclu des discussions portant sur laccord dassociation avec lUkraine, qui a mis le feu aux poudres en 20132014. Alors quà Moscou, on estime quen vertu des liens historiques et économiques avec Kiev, Bruxelles aurait dű associer Moscou aux discussions, règne en Europe la conviction diamétralement opposée. Lidée même de sphère dinfluence pour la Russie est considérée comme illégitime, analyse le politiste britannique Richard Sakwa, alors que le champ de ses intérêts légitimes [de la Russie] et comment Moscou a le droit de les exprimer reste flou19.

Les chances pour lavenir

La ligne paneuropéenne sest brisée sur la Crimée, reconnaît M. Roubinski. Moscou na guère dillusion sur la possibilité de relancer une relation privilégiée avec lEurope, la Russie juge celle-ci alignée sur la politique hostile des États-Unis. Si elle devait lêtre, ce serait à une condition: se voir reconnu un statut dégal. Ce quon a offert à la Russie nest pas le Grand Occident (Greater West), mais ladhésion à lOccident dans son acception historique, et à une position subalterne, résume Sakwa. Cest précisément ce que Moscou ne souhaite plus: Nous ne supplierons personne [de lever les sanctions économiques qui frappe la Russie depuis 2014] a prévenu le ministre russe des affaires étrangères, M. Lavrov, lors dune conférence de presse commune avec son homologue belge, le 13 février dernier. Ce partenariat, sil devait être relancé, sinscrirait désormais dans une vision qui na plus rien à voir avec la vision gorbatchévienne dun retour à lEurope. Le monde a changé. Lépoque des blocs et des alliancesfermées estfinie, sagace , presque M. Fiodor Loukianov, rédacteur en chef de la revue Russia in Global affairs, lorsquon linterroge sur lavenir de lidée paneuropéenne.

Ваша оценка очень важна

0
Шрифт
Фон

Помогите Вашим друзьям узнать о библиотеке

Скачать книгу

Если нет возможности читать онлайн, скачайте книгу файлом для электронной книжки и читайте офлайн.

fb2.zip txt txt.zip rtf.zip a4.pdf a6.pdf mobi.prc epub ios.epub fb3