La morale chrétienne procède de la valeur inhérente de lindividu (lindividu est «limage de Dieu» dans lhomme) et du lien inséparable entre le bien, la vérité et la liberté. « Vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous affranchira», «Quiconque commet le péché est esclave du péché», a dit Jésus (Jean 8:32,34). En même temps, le bien et le vrai ne sexpriment pas dans des règles formelles impersonnelles, mais dans la personne même de Jésus-Christ; doù la non-formalisabilité fondamentale de la morale chrétienne, qui dans son essence même est la morale de la liberté. Exprimant la liberté de lhomme, la foi vraiment chrétienne ne repose pas sur la peur et la dette extérieure, mais sur lamour dirigé vers le Christ et vers chaque personne en tant que porteur de limage de Dieu.
Le bien est fait par une personne sur les voies de lutilisation du libre arbitre au nom de la personnalité et de lamour: « Celui qui naime pas na pas connu Dieu, car Dieu est amour» (1 Jn 4, 8). Une application différente du libre arbitre se transforme en abnégation et en dégradation spirituelle dune personne. Ainsi, la liberté humaine contient non seulement la possibilité du bien, mais aussi le risque du mal. Le mal est le faux usage de la liberté; la vérité de la liberté est la bonté. Dès lors, le mal na pas dessence indépendante et se réduit à la seule négation du bien: toutes les définitions supposées indépendantes du mal savèrent nêtre que des définitions du bien, prises de signe contraire.
Le mal est né comme une mauvaise décision dun esprit libre, mais par la chute initiale, il sest enraciné dans la nature humaine, la «infecté». Doù la spécificité de lascétisme chrétien: il ne lutte pas avec la nature humaine elle-même, mais avec le principe pécheur qui lhabite. En soi, la nature humaine est divine et digne de spiritualisation et dimmortalité (en cela le christianisme diffère du platonisme, du gnosticisme et du manichéisme). Une résurrection corporelle attend lhomme; après le Jugement dernier, les justes sont destinés à limmortalité corporelle dans de nouveaux corps transfigurés. Puisquil est difficile pour une personne de faire face aux désirs pécheurs enracinés dans sa nature, elle doit humilier lorgueil et remettre sa volonté à Dieu; dans un tel renoncement volontaire à la volonté propre, véritable, et non imaginaire, la liberté est acquise.