Шодерло де Лакло Пьер - Опасные связи / Les liaisons dangereuses. Книга для чтения на французском языке стр 14.

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De , ce 21 août 17**.

Lettre XXVII. Cécile Volanges à la Marquise de Merteuil

Mon Dieu, que vous êtes bonne, Madame ! comme vous avez bien senti quil me serait plus facile de vous écrire que de vous parler ! Aussi, cest que ce que jai à vous dire est bien difficile ; mais vous êtes mon amie, nest-il pas vrai ? Oh ! oui, ma bien bonne amie ! Je vais tâcher de ne pas avoir peur ; et puis, jai tant besoin de vous, de vos conseils ! Jai bien du chagrin ; il me semble que tout le monde devine ce que je pense ; et surtout quand il est là, je rougis dès quon me regarde. Hier, quand vous mavez vue pleurer, cest que je voulais vous parler, et puis, je ne sais quoi men empêchait ; et quand vous mavez demandé ce que javais, mes larmes sont venues malgré moi. Je naurais pas pu dire une parole. Sans vous, Maman allait sen apercevoir, et quest-ce que je serais devenue ? Voilà pourtant comme je passe ma vie , surtout depuis quatre jours !

Cest ce jour-là, Madame, oui, je vais vous le dire, cest ce jour-là que M. le Chevalier Danceny ma écrit : oh ! je vous assure que quand jai trouvé sa lettre, je ne savais pas du tout ce que cétait. Mais, pour ne pas mentir, je ne peux pas dire que je naie eu bien du plaisir en la lisant. Voyez-vous, jaimerais mieux avoir du chagrin toute ma vie, que sil ne me leût pas écrite ! Mais je savais bien que je ne devais pas le lui dire, et je peux bien vous assurer même que je lui ai dit que jen étais fâchée : mais il dit que cétait plus fort que lui, et je le crois bien ; car javais résolu de ne lui pas répondre, et pourtant je nai pas pu men empêcher. Oh ! je ne lui ai écrit quune fois, et même cétait, en partie, pour lui dire de ne plus mécrire : mais malgré cela il mécrit toujours ; et comme je ne lui réponds pas, je vois bien quil est triste, et ça mafflige encore davantage : si bien que je ne sais plus que faire, ni que devenir, et que je suis bien à plaindre.

Dites-moi, je vous en prie, Madame, est-ce que ce serait bien mal de lui répondre de temps en temps ? seulement jusquà ce quil ait pu prendre sur lui de ne plus mécrire lui-même, et de rester comme nous étions avant : car, pour moi, si cela continue, je ne sais pas ce que je deviendrai. Tenez, en lisant sa dernière lettre, jai pleuré, que ça ne finissait pas ; et je suis sûre que si je ne lui réponds pas encore, cela nous fera bien de la peine.

Je vais vous envoyer sa lettre aussi, ou bien une copie, et vous jugerez ; vous verrez bien que ce nest rien de mal quil demande. Cependant si vous trouvez que ça ne se doit pas, je vous promets de men empêcher ; mais je crois que vous penserez comme moi, que ce nest pas là du mal.

Pendant que jy suis, Madame, permettez-moi de vous faire encore une question : on ma bien dit que cétait mal daimer quelquun ; mais pourquoi cela ? Ce qui me fait vous le demander, cest que M. le Chevalier Danceny prétend que ça nest pas mal du tout, et que presque tout le monde aime ; si cela était, je ne vois pas pourquoi je serais la seule à men empêcher ; ou bien est-ce que ce nest un mal que pour les demoiselles ? car jai entendu Maman elle-même dire que Mme D aimait M. M et elle nen parlait pas comme dune chose qui serait si mal ; et pourtant je suis sûre quelle se fâcherait contre moi, si elle se doutait seulement de mon amitié pour M. Danceny. Elle me traite toujours comme un enfant, Maman ; et elle ne me dit rien du tout. Je croyais, quand elle ma fait sortir du couvent, que cétait pour me marier ; mais à présent il me semble que non : ce nest pas que je men soucie, je vous assure ; mais vous, qui êtes si amie avec elle, vous savez peut-être ce qui en est, et si vous le savez, jespère que vous me le direz.

Voilà une bien longue lettre, Madame , mais puisque vous mavez permis de vous écrire, jen ai profité pour vous dire tout, et je compte sur votre amitié.

Jai lhonneur dêtre, etc.

Paris, ce 23 août 17**.

Lettre XXVIII. Du Chevalier Danceny à Cécile Volanges

Eh ! quoi, Mademoiselle, vous refusez toujours de me répondre ! rien ne peut vous fléchir ; et chaque jour emporte avec lui lespoir quil avait amené ! Quelle est donc cette amitié que vous consentez qui subsiste entre nous, si elle nest pas même assez puissante pour vous rendre sensible à ma peine ? si elle vous laisse froide et tranquille, tandis que jéprouve tous les tourments dun feu que je ne puis éteindre ? si loin de vous inspirer de la confiance, elle ne suffit pas même pour faire naître votre pitié ? Quoi ! votre ami souffre et vous ne faites rien pour le secourir ? Il ne vous demande quun mot, et vous le lui refusez ? et vous voulez quil se contente dun sentiment si faible, dont vous craignez encore de lui réitérer les assurances ?

Vous ne voudriez pas être ingrate, disiez-vous hier ! ah ! croyez-moi, Mademoiselle ; vouloir payer de lamour avec de lamitié, ce nest pas craindre lingratitude, cest redouter seulement den avoir lair. Cependant je nose plus vous entretenir dun sentiment qui ne peut que vous être à charge, sil ne vous intéresse pas ; il faut au moins le renfermer en moi-même, en attendant que japprenne à le vaincre. Je sens combien ce travail sera pénible ; je ne me dissimule pas que jaurai besoin de toutes mes forces ; je tenterai tous les moyens : il en est un qui coûtera le plus à mon cœur, ce sera celui de me répéter souvent que le vôtre est insensible. Jessaierai même de vous voir moins, et déjà je moccupe den trouver un prétexte plausible.

Quoi ! je perdrais la douce habitude de vous voir chaque jour ! Ah ! du moins je ne cesserai jamais de la regretter. Un malheur éternel sera le prix de lamour le plus tendre ; et vous laurez voulu, et ce sera votre ouvrage ! Jamais, je le sens, je ne retrouverai le bonheur que je perds aujourdhui ; vous seule étiez faite pour mon cœur ; avec quel plaisir je ferais le serment de ne vivre que pour vous ! Mais vous ne voulez pas le recevoir ; votre silence mapprend assez que votre cœur ne vous dit rien pour moi ; il est à la fois la preuve la plus sûre de votre indifférence, et la manière la plus cruelle de me lannoncer. Adieu, Mademoiselle.

Je nose plus me flatter dune réponse ; lamour leût écrite avec empressement, lamitié avec plaisir, la pitié même avec complaisance : mais la pitié, lamitié et lamour sont également étrangers à votre cœur.

Paris, ce 23 août 17**.

Lettre XXIX. Cécile Volanges à Sophie Carnay

Je te le disais bien, Sophie, quil y avait des cas où on pouvait écrire ; et je tassure que je me reproche bien davoir suivi ton avis, qui nous a tant fait de peine, au Chevalier Danceny et à moi. La preuve que javais raison, cest que Mme de Merteuil, qui est une femme qui sûrement le sait bien, a fini par penser comme moi. Je lui ai tout avoué. Elle ma bien dit dabord comme toi : mais quand je lui ai eu tout expliqué, elle est convenue que cétait bien différent ; elle exige seulement que je lui fasse voir toutes mes lettres et toutes celles du Chevalier Danceny, afin dêtre sûre que je ne dirai que ce quil faudra ; ainsi, à présent, me voilà tranquille. Mon Dieu, que je laime Mme de Merteuil ! elle est si bonne ! et cest une femme bien respectable. Ainsi il ny a rien à dire.

Comme je men vais écrire à M. Danceny, et comme il va être content ! il le sera encore plus quil ne croit : car jusquici je ne lui parlais que de mon amitié, et lui il voulait toujours que je dise mon amour. Je crois que cétait bien la même chose ; mais enfin je nosais pas, et il tenait à cela. Je lai dit à Mme de Merteuil ; elle ma dit que javais eu raison, et quil ne fallait convenir davoir de lamour, que quand on ne pouvait plus sen empêcher : or je suis bien sûre que je ne pourrai pas men empêcher plus longtemps ; après tout cest la même chose, et cela lui plaira davantage.

Mme de Merteuil ma dit aussi quelle me prêterait des livres, qui parlaient de tout cela, et qui mapprendraient bien à me conduire, et aussi à mieux écrire que je ne fais : car, vois-tu, elle me dit tous mes défauts, ce qui est une preuve quelle maime bien ; elle ma recommandé seulement de ne rien dire à Maman de ces livres-là, parce que ça aurait lair de trouver quelle a trop négligé mon éducation, et ça pourrait la fâcher. Oh ! je ne lui en dirai rien.

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