Джек Марс - L'Agent Zéro стр 3.

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Reid observa avec étonnement les filles mettre la table et servir le dîner. “Ce repas a l’air délicieux, Maya,” dit-il.

“Oh, attends. Il manque un truc.” Elle sortit quelque chose du frigo : une bouteille brune. “La belge est ta préférée, pas vrai ?”

Les yeux de Reid devinrent suspicieux. “Comment as-tu… ?”

“Ne t’en fais pas, c’est Tatie Linda qui l’a achetée.” Elle fit sauter la capsule et versa la bière dans un verre. “C’est bon. On peut manger maintenant.”

Reid avait de la veine que Linda, la sœur de Kate, ne vive qu’à quelques minutes de là. Gagner sa vie en tant que professeur, tout en élevant deux adolescentes, aurait été tout bonnement impossible sans elle. Sa présence avait été l’une des principales motivations pour venir s’installer à New York, afin que les filles aient un modèle féminin positif auprès d’elles. (Même s’il devait bien admettre ne pas être fan de l’idée que Linda puisse acheter de la bière à son adolescente, peu importe pour qui elle était destinée.)

“Maya, c’est vraiment très bon,” s’exclama-t-il dès la première bouchée.

“Merci. C’est un laquage mexicain chipotle.”

Il s’essuya la bouche, posa sa serviette et demanda, “Bon, c’est trop beau pour être honnête. Qu’est-ce que tu as fait ?”

“Quoi ? Mais rien du tout !” s’écria-t-elle.

“Alors, qu’est-ce que tu as cassé ?”

“Je n’ai rien…”

“Tu as été renvoyée ?”

“Papa, enfin…”

Reid saisit la table à deux mains de façon totalement mélodramatique. “Oh mon Dieu, ne me dis pas que tu es enceinte. Je n’ai même pas de fusil.”

Sara explosa de rire.

“Mais tu vas arrêter à la fin ?” souffla Maya. “J’ai le droit d’être gentille, tu sais.” Ils mangèrent en silence pendant environ une minute avant qu’elle ajoute innocemment, “Mais, maintenant que tu le dis…”

“Oh, bon sang. Nous y voilà.”

Elle se râcla la gorge et dit, “J’ai une sorte de rendez-vous. Pour la Saint Valentin.”

Reid faillit s’étouffer avec sa côtelette.

Sara fit la grimace. “Je te l’avais bien dit qu’il allait devenir bizarre.”

Une fois remis de ses émotions, il leva la main. “Attends, attends, je ne suis pas bizarre. C’est juste que je ne m’attendais pas… Je ne pensais pas que tu, euh… Tu as un petit copain ?”

“Non,” s’empressa de dire Maya. Puis, elle haussa les épaules et baissa les yeux vers son assiette. “Enfin peut-être. Je ne sais pas encore. Mais, c’est un mec sympa et il veut m’emmener dîner en ville…”

“En ville,” répéta Reid.

“Oui, Papa, en ville. Et il me faut une robe. C’est un endroit chic. Je n’ai pas grand-chose à me mettre.”

Maintes fois, Reid aurait désespérément eu besoin que Kate soit là, mais elle se serait peut-être sentie aussi dépassée que lui dans le cas présent. Il avait bien conscience que ses filles auraient des petits copains à un moment ou un autre, mais il espérait que ce ne serait pas le cas avant leurs vingt-cinq ans. C’était dans des moments pareils qu’il ressortait son acronyme parental fétiche, QDK : que dirait Kate ? En tant qu’artiste à l’esprit totalement libéré, elle gérerait certainement la situation bien différemment de lui, et il tâcha de garder ça à l’esprit.

Il devait avoir l’air particulièrement perturbé, car Maya eut un léger rire, et posa la main sur la sienne. “Tu es d’accord, Papa ? C’est juste un rencart. Il ne va rien se passer. Ce n’est pas la fin du monde.”

“Mouais,” dit-il doucement. “Tu as raison. C’est clair que ce n’est pas la fin du monde. Nous allons demander à Tante Linda si elle peut t’emmener au centre commercial ce week-end et…”

“Je préférerais que tu m’accompagnes.”

“Vraiment ?”

Elle haussa les épaules. “En fait, je ne veux pas porter quoi que ce soit que tu désapprouverais.”

Une robe, un dîner en ville et un certain garçon… ce n’était pas un truc qu’il aurait pensé devoir gérer de sitôt.

“Très bien,” dit-il. “Dans ce cas, nous irons ensemble samedi. Mais à une condition : c’est moi qui choisis le jeu ce soir.”

“Hum,” dit Maya. “Ce n’est pas rien comme contrepartie. Laisse-moi consulter mon associée d’abord.” Maya se retourna vers sa sœur.

Sara acquiesça. “OK, c’est d’accord, tant que tu ne choisis pas Risk.”

Reid prit un air moqueur. “Tu ne sais pas de quoi tu parles. Risk est le meilleur jeu qui existe.”

Après le dîner, Sara lava la vaisselle, pendant que Maya préparait du chocolat chaud. Reid opta pour l’un de ses jeux préférés, Ticket to Ride, un jeu classique consistant à construire des rails de train dans tous les États-Unis. Alors qu’il préparait les cartes et les wagons en plastique, il ne put s’empêcher de penser à comment il en était arrivé là. Comment Maya avait-elle pu grandir si vite ? Ces deux dernières années, depuis le décès de Kate, il avait joué le rôle des deux parents (avec l’aide précieuse de Tante Linda). Elles avaient encore besoin de lui toutes les deux, du moins le pensait-il, mais elles iraient dans peu de temps à l’université, puis elles auraient leurs carrières à mener, et ensuite…

“Papa ?” Sara entra dans la salle à manger et s’assit en face de lui. Comme si elle pouvait lire dans son esprit, elle lui dit, “N’oublie pas que j’ai une expo d’art à l’école mercredi soir prochain. Tu seras là, pas vrai ?”

Il sourit. “Bien sûr, ma chérie. Je ne voudrais pas rater ça.” Soudain, il tapa dans ses mains. “Bon ! Qui est prête à prendre sa râclée… Je veux dire, qui est prête à jouer à un jeu sympa en famille ?”

“Amène-toi, mon vieux,” cria Maya depuis la cuisine.

“Mon vieux ?” répéta Reid indigné. “J’ai trente-huit ans !”

“Je tâcherai de m’en rappeler.” Elle éclata de rire en pénétrant dans la pièce. “Oh, le jeu du train.” Son rire se transforma en léger sourire. “C’était le préféré de Maman, non ?”

“Oh… si.” Reid fronça les sourcils. “En effet.”

“Je prends les bleus !” annonça Sara en récupérant ses pièces.

“Orange,” dit Maya. “Papa, quelle couleur ? Allô, Papa ?”

“Oh.” Reid sortit de sa torpeur. “Désolé. Euh, vert.”

Maya poussa les pièces vertes vers lui. Reid s’efforça de sourire, même si son esprit était troublé.

*

Au bout de deux parties, toutes gagnées par Maya, les filles s’en allèrent au lit et Reid se retira dans son bureau, une petite pièce au premier étage, juste au-dessus de l’entrée.

Riverdale n’était pas un quartier bon marché, mais il avait semblé important pour Reid de s’assurer que ses filles soient dans un environnement sûr et agréable. Étant donné qu’il n’y avait que deux chambres, il avait revendiqué comme bureau la piaule du premier étage. Tous ses livres et ses souvenirs s’entassaient sur presque chaque centimètre carré disponible de cette pièce de 9m². Outre son bureau et un fauteuil en cuir, la seule chose encore visible était un petit tapis usé.

Il s’endormait souvent sur son fauteuil après de longues soirées à prendre des notes, préparer ses cours et relire des biographies. Il commençait d’ailleurs à avoir des problèmes de dos. Et, pour être tout à fait honnête, il ne dormait pas mieux dans son propre lit. Même s’il avait emménagé à New York avec les filles peu après la mort de Kate, il avait toujours le lit et le matelas King Size qui avait été le leur, à lui et à Kate.

Il aurait pu penser que la douleur d’avoir perdu Kate se serait estompée à présent, du moins légèrement. Parfois, c’était temporairement le cas mais, en passant devant sa chaîne de restaurants préférée ou en tombant sur l’un de ses films favoris à la télé, cette douleur revenait au galop, aussi vive que si ça s’était passé la veille.

Si les filles ressentaient la même chose, elles ne l’exprimaient jamais en tout cas. En fait, elles parlaient souvent d’elle ouvertement, chose que Reid était encore incapable de faire.

Il y avait une photo d’elle sur l’une de ses étagères, prise au mariage d’un ami une décennie plus tôt. Quasiment tous les soirs, il retournait le cadre, sans quoi il pourrait passer la nuit entière à le regarder.

Comme le monde pouvait être incroyablement injuste. Avant, ils avaient tout : une jolie maison, des filles géniales, de belles carrières. Ils vivaient à McLean, en Virginie. Il travaillait en tant que professeur adjoint à l’université voisine George Washington. Il voyageait beaucoup pour son travail, entre les séminaires et les congrès, en tant que lecteur invité sur l’histoire de l’Europe dans des écoles du pays entier. Kate faisait partie du département restauration du Musée d’Art Américain Smithsonian. Leurs filles étaient épanouies. La vie était parfaite

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