S'il n'avait été question que de la première demande à laquelle a donné lieu le discours de M. Dumouriez et la réponse de M. le président, je n'aurais point élevé la voix. Maintenant ce sont les principes de la société qui se trouvent en cause. Je ne suis point de ceux qui croient qu'il est absolument impossible qu'un ministre soit patriote et même j'accepte avec plaisir les présages heureux que nous offre M. Dumouriez. Quand il aura rempli ces présages, quand il aura dissipé les ennemis armés contre nous par ses prédécesseurs, et les conjurés qui dirigent notre gouvernement, malgré l'expulsion de quelques ministres, alors, seulement alors, je serai disposé à lui décerner tous les éloges dont il sera digne; alors néanmoins je ne penserai point qu'un bon citoyen de cette société ne soit pas son égal, et que tout membre qui montera à cette tribune pour s'élever contre l'impression du discours d'un ministre quel qu'il soit, puisse être réduit à la quitter par des cris et des clameurs confuses. C'est par amour pour la liberté, c'est par respect pour les droits du peuple, qui seul est grand, qui seul est respectable à mes yeux, et devant lequel s'évanouissent les hochets des puissances ministérielles, que je rappelle la société à ses principes. C'est pour la société, c'est pour le ministre même, que je demande que l'on n'annonce pas à son arrivée la décadence de l'esprit public. Que des ministres viennent ici pour unir leurs efforts à ceux de tous les bons citoyens qui composent cette société, qu'ils viennent demander des conseils, qu'ils en reçoivent et qu'ils les pratiquent, qu'ils méritent l'amour de la nation; c'est à ces conditions seulement que leur présence peut être utile dans cette société, et s'il faut des conseils aux ministres, je promets pour ma part de leur en donner qui seront avantageux et pour eux et pour la chose publique.
J'ai rempli mon objet, puisque ces principes sont gravés dans les coeurs de tous les membres de cette société, puisque rien ne pourra jamais en altérer la pureté. Aussi longtemps que M. Dumouriez par des preuves éclatantes de patriotisme et surtout par des services réels rendus à la patrie, prouvera qu'il est le frère des bons citoyens et le zélé défenseur du peuple, il ne trouvera parmi nous que des appuis.
Je ne redoute pour cette société la présence d'aucun ministre, mais je déclare qu'à l'instant où un fonctionnaire semblable y aurait plus d'influence qu'un bon citoyen qui s'est constamment distingué par son patriotisme, il nuirait à la société, et je jure au nom de la liberté qu'il n'en sera jamais ainsi. Cette société sera toujours l'effroi de la tyrannie et l'appui de la liberté.
J'ai rempli mon objet, puisque ces principes sont gravés dans les coeurs de tous les membres de cette société, puisque rien ne pourra jamais en altérer la pureté. Aussi longtemps que M. Dumouriez par des preuves éclatantes de patriotisme et surtout par des services réels rendus à la patrie, prouvera qu'il est le frère des bons citoyens et le zélé défenseur du peuple, il ne trouvera parmi nous que des appuis.
Je ne redoute pour cette société la présence d'aucun ministre, mais je déclare qu'à l'instant où un fonctionnaire semblable y aurait plus d'influence qu'un bon citoyen qui s'est constamment distingué par son patriotisme, il nuirait à la société, et je jure au nom de la liberté qu'il n'en sera jamais ainsi. Cette société sera toujours l'effroi de la tyrannie et l'appui de la liberté.
Maximilien Robespierre (1758-1794), Discours prononcé au Club des Jacobins le 19 mars 1792 (19 mars 1792)
(Opinion de Robespierre sur le bonnet rouge.)
(Pétion, maire de Paris, avait écrit à la Société pour l'engager à s'abstenir de tous signes extérieurs qui pourraient lui donner le caractère d'un parti, d'une faction. Il voulait parler du bonnet rouge que portait chaque membre des Jacobins. Robespierre prit ta parole en cette occasion et s'exprima ainsi:)
Je respecte, comme le maire de Paris, tout ce qui est l'image de la liberté; mais nous avons un signe qui nous rappelle sans cesse le serment de vivre libres ou de mourir, et ce signe, le voilà! (Il montre sa cocarde.) En déposant le bonnet rouge, les citoyens qui l'avaient pris par un patriotisme louable, ne perdront rien. Les amis de la liberté continueront à se reconnaître sans peine au même langage, au signe de la raison et de la vertu, tandis que tous les autres emblèmes peuvent être adoptés par les aristocrates et les traîtres.
II faut, dit-on, employer de nouveaux moyens pour ranimer le peuple. Non, car il a conservé le sentiment le plus profond de la patrie. C'est lui qui attend constamment le jour du bonheur commun, retardé par les perfides intrigues de ceux qui ont voulu le mettre dans les fers. Le peuple n'a pas besoin d'être excité, il faut seulement qu'il soit bien défendu. C'est le dégrader que de croire qu'il est sensible à des marques extérieures. Elles ne pourraient que le détourner de l'attention qu'il donne aux principes de liberté et aux actes des mandataires auquel» il a confié sa destinée.