Le fracas assourdissant des tirs, ainsi que la vue de tant de bandits qui se faisaient descendre, renversa le cours de la bataille. Les attaquants senfuirent dans les bois, en abandonnant les vivres quils avaient volées dans la panique de la fuite. Les soldats du convoi de chariots coururent à leur poursuite.
Le grand officier au manteau écarlate remonta la piste au galop, suivi par une troupe de cavaliers. Il observa la scène, cria un ordre et fit signe à sa cavalerie de charger dans les bois.
Lofficier descendit de cheval et, tandis quil avançait parmi les corps, lun des fantassins lui fit un rapport, en parlant avec agitation et en montrant du doigt les soldats dAlexander. Lofficier hochait la tête et posait des questions tout en parcourant la section du regard.
Qui est-ce qui a la trousse médicale STOMP? cria Alexander.
Elle est dans le coffre darmement, Mon adj, dit Kawalski.
Amenez-la, dit Alexander. Voyons ce quon peut faire pour ces gens. Occupez-vous dabord de la femme dans le chariot. Elle perd beaucoup de sang.
Entendu, Mon adj.
Sparks, comment tu te sens? demanda Alexander.
Sparks défit son gilet doù dépassait la tête de la flèche. Il regarda sil y avait des dégâts. Ouais. dit-il en tapant sur son gilet pare-balles avec les phalanges. Ces trucs marchent plutôt bien.
Karina était assise par terre près dune roue de chariot, les bras repliés sur les genoux, et la tête appuyée sur ses avant-bras.
Ballentine! dit Alexander en courant vers elle. Tes touchée?
Elle secoua la tête mais ne leva pas les yeux. Il sagenouilla près delle.
Quest-ce qui ne va pas?
Elle secoua à nouveau la tête.
Comptez-vous les gars, dit Alexander au micro en sasseyant près de Karina.
Tout le monde fut au rapport, sauf Sharakova.
Sharakova est juste là, dit Sparks. Elle a buté six de ces salauds.
Sparks, tu peux réparer la putain de radio de Sharakova?
Je vais faire de mon mieux.
Eh bien, tu ty mets avant quelle naille se paumer quelque part.
Karina retira son casque et le laissa tomber par terre.
Cétait vachement trop facile. murmura-t-elle.
Alexander attendait sans dire un mot.
Quand Kawalski descendit le premier gars dans le chariot, dit Karina ensuite vous avez eu celui qui était au sol, et moi jai continué machinalement.
Alexander lui tapa sur lépaule.
Mon adj, jai jamais tué personne avant.
Je sais.
Comment ça peut être aussi facile? Ces types ne faisaient pas le poids contre nos armes. Pourquoi est-ce que jai pas juste essayé de les blesser au bras ou à la jambe au lieu de les dézinguer?
Karina
On est arrivés où, putain? demanda Karina. Et quest-ce qui nous arrive? Je croyais que cétait juste une mise en scène très sophistiquée jusquà ce que ce bandit entaille le bras de la femme et que du véritable sang se mette à couler. Ensuite il y a eu ce fantassin qui sest fait ouvrir le bide. Est-ce quon a atterri dans une espèce de cauchemar surréaliste?
Je sais pas ce qui nous est arrivé, mais tu as réagi exactement comme tu avais à le faire. Tout notre entraînement sest fait précisément pour ce genre dattaque. On a pas le temps danalyser, dévaluer les options, ou de viser le genou au lieu du coeur. Moins de trois secondes se sont écoulées entre le premier tir de Kawalski et ton premier tué. Tu es un parfait soldat, pas une femme au coeur tendre, du moins pas sur le champ de bataille. Cest ce que cet endroit étrange est devenu tout dun coup, un champ de bataille. Et devine qui a gagné la bataille? La force la mieux armée et la mieux entraînée au monde. Si on navait pas ouvert le feu, ces bandits sen seraient pris à nous avec leurs épées et leurs lances après avoir achevé ces autres gens.
Karina releva la tête et sessuya la joue. Merci, mon adj. Vous avez raison. Cest vraiment le soldat en moi qui a pris le relais, mais maintenant je me remets, et jessaie de faire la part des choses.
Hé, Mon adj, dit Kawalski par radio. Jai besoin daide pour soigner la blessure au bras de cette femme.
Jarrive. Alexander se leva et tendit la main à Karina.
Elle se releva. Jy vais. Elle ramassa son fusil et son casque, fit une brève accolade à Alexander puis elle courut vers le dernier chariot.
Je nai jamais tué personne non plus, murmura-t-il jusquà aujourdhui.
Vous avez été bon, Mon adj, dit le soldat Lorelei Fusilier par radio.
Merde, dit Alexander. Joublie toujours que cette putain de radio est allumée.
Ouais, Mon adj, dit Sparks. Vous avez été un vrai père pour nous.
OK. Allez, on arrête le bavardage. Maintenant on a affaire à une autre sorte de jeu, donc faut quon analyse très attentivement la situation. Et restez sur le qui-vive. Dans le feu de laction, on a choisi un camp ; maintenant il faut voir si on a choisi le bon.
Chapitre quatre
Karina sagenouilla près dun fantassin, et soccupa dune entaille sanglante dans sa cuisse. Lépée avait traversé de part en part, mais si elle pouvait nettoyer la blessure et arrêter lhémorragie il devrait sen sortir.
Allongé au sol et appuyé sur les coudes, le blessé la regardait. Les autres fantassins allaient et venaient, occupés à ramasser des armes sur le champ de bataille, et elle les entendait achever les attaquants blessés leur tranchant la gorge ou leur transperçant le coeur avec leur épée. Cétait barbare, écoeurant et cela la mit en colère mais elle ny pouvait rien ; donc elle essayait seulement détouffer les sons tout en travaillant.
Elle termina de suturer la blessure et approcha la main du bandage liquide Gelspray, mais avant quelle nait eu le temps de lappliquer sur la blessure, lhomme poussa un cri au moment où une épée sabattit sur lui, lui transperçant le coeur.
Espèce de sale fils de pute! Elle se mit debout dun bond, repoussant le fantassin. Tu viens de poignarder lun de tes propres hommes.
Il tituba en arrière mais en se retenant à lépée quil retira du corps de lhomme. Karina baissa les yeux vers lhomme qui avait été poignardé; sa bouche était béante, laissant échapper un faible cri muet dappel à laide tandis que ses yeux grands ouverts étaient fixés au ciel. Puis ses yeux se fermèrent et son corps se relâcha.
Jaurais pu le sauver, espèce didiot ignorant.
Le soldat eut un rire et avança dun pas vers elle, son épée ensanglantée pointée vers son ventre.
Jai son front dans ma ligne de lire, Karina, dit Kawalski par radio. Tu nas quà dire un mot et je lui éclate la cervelle.
Jai son coeur en visuel, dit Joaquin.
Et moi jai sa veine jugulaire, dit Lorelei Fusilier.
Non, dit Karina. Cette salope est rien que pour moi.
Sukal! cria une femme derrière Karina.
Lhomme regarda derrière Karina, puis la regarda à nouveau avec toujours ce même sourire lubrique.
Karina ne put voir qui était la femme elle devait continuer à garder les yeux sur les siens. Quest-ce qui est arrivé à tes dents, Sukal? demanda-t-elle Quelquun te les a cassées dun coup de pied?
Sukal brandit son épée comme un cobra qui veut charmer sa proie subjuguée.