Apparemment..., répondit Bjorn. Maintenant il faut quils sengagent à fond et démontrent quils méritent bien ce présage, ajouta-t-il en sadressant aux deux enfants, déjà prêts à recevoir ses ordres.
Du bruit dans leur dos attira lattention dOlaf et dHarald. Les portes de létable souvrirent et, après six mois, une multitude danimaux se déversa à lextérieur tandis que quelques hommes du clan, entre mugissements, grognements et bèlements, sefforçaient de maintenir un semblant dordre pour mener les plus de cinq cents têtes de bétail sur les terres où ils pourraient paître en liberté.
Emmenez le bétail loin dici autrement ces deux-là vont en faire un massacre !, sécria Olaf dun ton goguenard.
Au milieu de toute cette agitation survint Leif qui, dun pas rapide se dirigeait dans leur direction, apparemment anxieux de leur communiquer quelque chose.
La vieille Sigrùn a vu la chèvre et vous fait dire quelle vous attend tous dans la Clairière Sacrée, leur annonça-t-il dès quil les eut rejoints.
Entendu !, commenta Olaf, échangeant un regard dentente avec Harald.
Vous reprendrez lentraînement à notre retour, dit-il à Bjorn.
Je vous attends ici, répondit larcher.
Tous les quatre se mirent en marche, laissant le village derrière eux. La terre sétait libérée de sa gangue de glace et, avec la douceur dispensée par le soleil, la vie avait repris dans le village de Gokstad. Le domaine dOlaf était beau, de grandes dimensions et sétendait le long de la côte et vers lintérieur des terres sur des kilomètres, ce dont il nétait pas peu fier.
Les champs étaient séparés par des murets de pierre qui les ceinturaient ; quelques paysans étaient occupés à labourer la terre, dautres soccupaient des semailles : le seigle, lorge si précieux, tous les légumes et lavoine -cette dernière destinée à servir de fourrage pour nourrir le grand nombre de têtes de bétail au cours de lhiver à venir-.
Les premières fleurs constellaient les vastes étendues de trèfle dans lesquelles étaient disséminées des baies, des mûriers, des framboisiers ; ces prés sétendaient jusquà lendroit où, du sol, sélevaient les parois rocheuses qui marquaient la frontière davec les possessions dHarald. Avec le dégel, la cascade avait recommencé à jaillir au travers des roches recouvertes de lichens, grossissant le torrent qui traversait le bois et la Clairière Sacrée.
Le chemin quils parcouraient était bordé de rangées de pommiers et daubépines qui avaient germé et doù pointaient déjà des fleurs blanches. Ils poursuivirent leur chemin en silence, entre les bruits de la nature qui se réveillait et les rayons du soleil qui filtraient parmi les arbres. On entrevoyait les premiers nids construits par les oiseaux ; à certaines branches pendaient des paniers de paille en forme de spirale dans lesquels les abeilles avaient commencé à édifier leurs ruches : elles seraient emplies de miel à la fin de lété, miel avec lequel les Vikings feraient de lexcellent hydromel.
Ils parvinrent à la Clairière Sacrée où la vieille Sigrùn les attendait.
Ils sapprochèrent de la femme, enveloppée de la tête aux pieds dans son noir manteau. Deux tresses de cheveux blancs dépassaient de la capuche et lui tombaient jusquaux hanches, ses yeux ressortaient comme deux aigues-marines. Deux corbeaux, créatures liées au culte du dieu Odin, étaient immobiles sur ses épaules. La vieille étendit les bras vers le ciel et les deux oiseaux prirent leur envol au-dessus de leurs têtes, avant de disparaître dans lépaisseur des arbres.
Ce chêne a été planté par vos pères quand ils avaient à peu près votre âge ; il a grandi sain et fort, comme leur amitié, leur déclara-t-elle avec une pointe dorgueil dans la voix.
Puis elle sabaissa et cueillit un rejet issu des racines de larbre, et léleva vers le ciel.
Aujourdhui les dieux ont exprimé leur volonté à travers vos flèches et larbre de Thor a engendré une nouvelle vie... Vous êtes prêts pour votre serment ! proféra la vieille Sigrùn en offrant la pousse aux deux jeunes garçons.
Les deux petits Vikings choisirent un lieu peu éloigné du chêne et retournèrent une motte dherbe au-dessus de laquelle ils se percèrent la paume de la main droite pour ensuite, avec un poignée de main, mélanger leurs sangs en se jurant réciproquement fidélité ; avec le sang ils fertilisèrent la motte et sen servirent pour recouvrir la base de la pousse quils venaient de planter, scellant ainsi un pacte de fraternité pour toute leur vie...
Isgred, en plus de linstruction dispensée aux enfants dune noble maisonnée, devait apprendre comment gouverner la maison, particulièrement quand son mari aurait pris la mer pour une expédition lointaine. Elle aussi, un jour, comme sa mère, dirigerait la ferme, élèverait ses enfants, gérerait les affaires de son mari. Un jour elle aussi porterait, accrochées à sa ceinture, les clés de la maison, symbole de lautorité et du respect dont jouissait une femme dans la famille.
Chapitre 4
Lenfance des Indiens sécoulaient paisiblement.
Les parents enseignaient aux enfants comment construire de petites armes, des pièges, à reconnaître le bois le mieux adapté à la construction de canoë, ainsi que toutes les techniques de la chasse et de la pêche.
Les filles apprenaient de leurs mères à construire un tipi, à cultiver, cuisiner, tanner les peaux et à confectionner des vêtements.
Mais à la base de lâme bonne et pacifique des Indiens se trouvait la pratique du silence et de la méditation. Parce que le Grand Esprit est partout, les parents enseignaient à leurs enfants la pratique de lobservation et de lécoute. Parce que Lui est en toute chose et dans tous les êtres vivants...
Quand le soir descendait, chaque famille se retirait dans son tipi, tous sasseyaient autour du feu pendant que lancien de la famille racontait des récits chargés dhistoire et de traditions culturelles. Les anciens possédaient cette vertu primordiale chez lêtre humain : ils étaient les dépositaires de la culture et de la sagesse de leur peuple. Cétait de cette manière quétait transmis aux enfants lenseignement de la générosité, du courage, le respect et lamour pour les êtres vivants.
Année après année, les petits Indiens grandissaient...
Et pour Faucon Doré arriva également lâge de la puberté.
Tout le monde était occupé à lextérieur du tipi par les préparatifs de la fête que Grand Aigle avait organisée en lhonneur de sa fille.
À quatorze, on pouvait deviner la très belle femme quelle deviendrait. Sa mère lui expliqua la cause des changements survenus en elle.
Cest un moment très important dans la vie dune jeune fille... Tu deviens une femme.
Avec une infinie tendresse elle lui coiffa ses longs cheveux noirs, attardant son regard sur la frange qui lui couvrait le front. Cette coiffure symbolisait la virginité des jeunes filles.
Tu pourras également laisser pousser ces cheveux, la frange ne fera plus partie de ta coiffure de femme. À partir de ce jour tu pourras être courtisée et demandée en mariage. elle fit une pause tandis quelle séparait en deux parties le reste de lépaisse chevelure, avant de poursuivre avec la coiffure.
Écoute toujours la voix de ton cœur. Cest lui qui te parlera et te guidera tout au long du chemin. Un jour tu te marieras et tu auras des enfants, tu toccuperas de ta famille comme je lai fait avec vous, et ton mari prendra soin de vous, comme ton père la fait pour nous, lui expliqua sa mère pendant quelle disposait quelques plumes de faucon rouge entre les lacets colorés qui retenaient ses longues tresses.