Son ton sérieux et son regard déterminé me firent comprendre quelinvité attendu était une personne très importante.
De qui sagissait-il ? Javais absolument besoin de le savoir,donc je cherchai à temporiser et tentai de lembrasser pour gagnerdu temps, mais, à nouveau, il mécarta.
Ne moblige pas à être impoli, Danielle.
OK, tu as gagné, dis-je avec un soupir de renoncement. Enarrivant à la porte, je pus entendre Aleksej répondre au téléphoneet dire aux gardes de faire entrer linvité. Il le dit en russemais je saisis parfaitement chacune de ses paroles et je savaisque, si je voulais épingler cette personne, il maurait fallutrouver une excuse pour descendre dans le salon en passant par lecouloir principal et le grand escalier.
Je me dirigeai lentement vers la porte et sortis.
Au lieu de retourner dans la chambre qui métait assignée, jecontinuai mon chemin dans le couloir central qui débouchait sur legrand escalier, lequel se séparait en deux branches symétriquesopposées qui menaient toutes les deux au salon durez-de-chaussée.
Avec une véritable satisfaction, je croisai linvité dAleksejau moment où il gravissait les marches de lescalier.
Il portait des lunettes de soleil qui cachaient en partie sonvisage, mais il avait quelque chose de familier.
Je mattardai encore un peu, attendant quil parvînt au sommetdes marches pour passer à côté de lui.
Il me jeta un coup dœil qui ne méchappa pas, mais ilpoursuivit son chemin, comme si de rien nétait.
Jaurais voulu mapprocher et lui parler, mais je savais quunetelle attitude aurait suscité des soupçons ; or je ne pouvais pasrater cette occasion unique de connaître la personne avec laquelleAleksej faisait la contrebande de diamants ou par lentremise delaquelle il les échangeait contre autre chose.
Huit mois que jattendais cet instant.
Jen étais arrivée à coucher avec ce russe pour pénétrer dansson domicile, là où je savais quavaient lieu les rencontres lesplus intéressantes et profitables.
Et maintenant loccasion se présentait devant moi !
Lhomme me frôla et je feignis lindifférence mais, alors quejallais emprunter lescalier, je respirai lodeur de son after-shave.
Cétait un parfum particulier et très cher.
Je ne connaissais quun seul homme qui en mettait.
Un homme avec lequel javais eu une relation pendant près duneannée, relation basée sur de brèves rencontres épisodiques axéessur le sexe, ainsi que quelques bavardages au cours desquels nouséchangions sur le travail et nos rêves de gloire.
Près dune année sétait écoulée depuis notre dernière rencontremais, en un instant, limage de mon ex- me revint à lesprit.
Des cheveux blonds, les yeux bleus, une mâchoire carrée, le nezaquilin, taille et poids moyens
Jétouffai un sursaut : Ryan !
Du coup je me retournai, bouleversée.
Lui aussi sétait retourné et il avait ôté ses lunettes.
Ses cheveux étaient plus longs et il portait la barbe, maiscétait vraiment lui.
Comment était-ce possible ?
Je repensai à cette année-là avec lui et aux problèmes quejavais eus
Je me rappelais toutes les fois où je lui avais confié mesdoutes sur le fait que quelquun de mon entourage me roulait.
Comment as-tu pu me faire ça ?, je compris à linstant :cétait lui qui mavait mis des bâtons dans les roues depuis lecommencement.
Ce fut à cet instant précis que je compris à quel point ilmavait manipulée et comment il sétait efforcé de compromettre mesplans.
Instinctivement, je cherchai mon pistolet caché dans le fond dela poche de ma jupe, mais je me rendis compte trop tard de lavoirlaissé dans ma chambre lorsquAleksej mavait fait appeler.
Ryan en fit autant et je vis soudain le canon de son arme pointévers moi.
Kendra, ne le prends pas pour toi, mais un seul de nous deuxsortira vivant dici.
Il nest pas nécessaire quil en finisse ainsi, tentai-je dele convaincre, descendant lentement les marches sans lui tourner ledos.
Il était clair quil allait me trahir auprès dAleksej ; àpartir de cet instant-là il ny aurait plus dissue pour moi. Ilfallait que je quitte la villa à toute allure !
De plus, suite à laffront que javais subi, la colère mincitaà saisir mon téléphone portable pour appeler immédiatement mescontacts à lextérieur afin de leur dire de se méfier de Ryan.
Que diable se passe-t-il ici ?, gronda la voix dAleksej,détournant lattention de Ryan.
Javais suffisamment dexpérience pour comprendre que jétaisgrillée, donc je fis lunique chose qui fût encore possible : jepris le téléphone et commençai à écrire un message pour expliquerce qui se passait.
Lâche ce portable !, hurla Ryan hors de lui dès quil senrendit compte, me bloquant peu avant que jenvoie le message.
Je vis Aleksej arrêter Ryan dun geste et se diriger versmoi.
Son regard ressemblait à une fine plaque grise de verglas, prêteà se briser et éclater en mille fragments, lesquels toucheraientquiconque était à proximité.
Près de huit mois dans son entourage mavaient appris quilnaurait pas hésité à me faire payer chèrement chaque secondepassée auprès de lui et que javais exploitée à des finspersonnelles.
Le pardon était une chose quil ne maurait jamais accordée.
Je navais aucun doute à ce sujet.
Il ferait tout pour me détruire. Mais seulement après uneconfession complète pour quil découvre jusquà quel degré jétaisparvenue en agissant de cette manière pendant tout ce temps.
Donne-moi ton portable, souffla-t-il dune voix basse à un pasde moi, tendant sa main.
Je donnai un rapide coup dœil à lécran, regrettant les anciensportables où il suffisait dappuyer sur une touche facile àidentifier du bout des doigts, au lieu dêtre tout visuel.
Il ne me restait plus quà faire Envoi avec le pouce.
Jallais le faire, lorsque la main dAleksej parvint rapidementjusquà moi.
Je neus que le temps de déplacer le bras pour léviter mais,simultanément, un coup de feu retentit dans la villa.
Je ne me rendis pas compte du projectile qui venait dans madirection, lorsquune violente douleur au niveau la poitrine mecoupa la respiration et, me poussant en arrière, me fitbasculer.
Les talons de mes chaussures perdirent leur point dappuihabituel et, avant que je puisse agripper le bras dAleksej, jebasculai dans le vide.
Je perçus à peine le contact des doigts dAleksej avant decommencer à plonger vers ma propre fin.
La dernière chose dont je me souvins était son nom que jeprononçai faiblement, comme un appel à laide désespéré et puisla douleur.
La douleur seule me fit sentir encore vivante, malgré la ballelogée à quelques centimètres de mon sternum et les chocs répétéssur les marches de lescalier au bas duquel je roulai.
Et puis le noir absolu.
2
ALEKSEJQuarante-huit heures sétaient écoulées depuis cet épisode defolie qui avait eu lieu chez moi.
Des heures passées à pester contre moi-même pour ne pas mêtrerendu compte de la duplicité de Danielle Stenton, alias KendraPalmer.
Comment avais-je pu être aussi naïf ?
Comment avais-je pu ne pas mapercevoir de sa véritable nature?
Javais bien eu quelques soupçons !
Était-il possible que la beauté de cette femme mait ébloui aupoint den perdre la tête jusquà devenir stupide et aveugle ?