Quand avez-vous décidé dâaccepter le rôle de Ruyi dans Temptress Moon ?
Ãa sâest fait presque par hasard. Ou par un destin prophétique, parce que ça a été une « tentation » pour moi aussi. On mâa proposé le rôle au dernier moment, alors que le tournage avait déjà commencé, après quâune actrice de Taïwan avait décidé de ne pas continuer. Savez-vous que les critiques chinois ont comparé Temptress Moon à Autant en emporte le vent ?
Ah, et pourquoi ?
Pas en raison de lâhistoire, mais pour le choix des acteurs. Chen a vu des dizaines dâactrices pour mon rôle, exactement comme dans Autant en emporte le vent on a écarté une actrice après lâautre avant de choisir Vivian Leigh pour le rôle de Scarlett O'Hara. Câest ainsi que je suis arrivée alors que le tournage avait déjà commencé. Et ça nâa pas été facile. On voulait que jâinterprète un personnage complètement différent de ceux que je joue dâhabitude : dans ce film, je devais être une jeune femme riche et capricieuse.
Aujourdâhui, le cinéma chinois vit un moment magique, grâce à des réalisateurs comme Kaige et des acteurs comme vous. Mais également grâce à des noms tels que John Woo ou Ang Lee, qui travaillent à Hollywood .
Je pense que lâexplication est que les réalisateurs chinois unissent une technique cinématographique irréprochable à ce charme et à ce style uniques qui appartiennent à notre culture.
Comment avez-vous commencé à jouer ?
Complètement par hasard. Quand jâétais petite, jâaimais chanter. Un jour, mon professeur de chant me dit de lâaccompagner pour voir le tournage dâun téléfilm à Shandong. Câétait une femme qui le réalisait, je me souviens. Quand elle mâa vu, elle a décidé que je devais jouer un rôle, et elle mâa donné le scénario à lire. Câétait un petit rôle. Mais elle décida que jâétais une actrice née. Câest ce quâelle a dit à ma mère : « Votre fille doit être actrice ». Elle a réussi à la convaincre, et deux mois après, je suis entrée au conservatoire de Pékin. Jâai travaillé dur, je me souviens, jâai commencé à jouer des petits rôles, et puisâ¦
Vous vivez entre Pékin et Hong Kong. Les journaux parlent de votre nouvelle histoire dâamour avec un homme dâaffaires de Hong Kong. Vous pensez vous y installer définitivement ?
Je ne crois pas. Jâaime Hong Kong parce que câest une ville frénétique. Câest bien pour le shopping. Mais je la trouve ennuyeuse. Pékin est différente. Dans la rue, les gens se rencontrent et vous parlent, discutent. à Hong Kong on ne pense quâà faire de lâargent.
Ãtes-vous agacée de lââintérêt de la presse pour votre vie privée ?
Je pense que câest inévitable. Câest surtout la presse asiatique qui écrit des choses désagréables, des inventions. Les journaux occidentaux sont plus corrects.
En Chine aussi, câest important dâêtre belle, pour une actrice ?
Vous trouvez que je suis belle ?
En Occident vous êtes considérée comme un sex-symbol.
Eh bien, ça me fait plaisir. Mais je ne me sens pas un sex-symbol. Je dois peut-être représenter la personnalité ou le charme de la femme chinoise, qui sont très différents de ceux des femmes occidentales.
Quels projets avez-vous ?
Je voudrais me marier et avoir des enfants, je pense que la famille est très importante dans la vie dâune femme. Sans famille, on ne peut pas apporter la vérité de tous les jours dans son travail.
Des projets cinématographiques ?
Pas pour lâinstant. Je lis beaucoup de scénarios, mais je ne trouve rien qui me plaise. Je ne crois pas quâil faille accepter un rôle juste pour sâoccuper.
Vous travailleriez avec un réalisateur occidental ?
Pourquoi pas, sâil avait un rôle pour moi, un rôle pour une femme chinoise ?
Y a-t-il un Italien avec lequel vous aimeriez travailler ?
Bien sûr, Bernardo Bertolucci !
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Ingrid Betancourt
La pasionaria des Andes
Chère Dina, voilà le papier, lâencadré suit. Jâespère que tout va bien. Je prends lâavion aujourdâhui (lundi 11) de Tokyo pour Buenos Aires, où jâarriverai demain, le 12 février. Après, je serai toujours joignable par satellite, même pendant la ânavigationâ antarctique. Je serai de retour en Argentine autour du 24 février, avant de partir pour Bogota, où je dois rencontrer Ingrid Betancourt début mars.
Dis-moi si ça tâintéresse.
à bientôt
Marco
Jâavais envoyé ce mail, retrouvé dans un vieil ordinateur, à Dina Nascetti, lâune de mes responsables à lâEspresso, début février 2002, pour la tenir au courant de mes déplacements. Jâétais allé au Japon pour un reportage sur la tombe du Christ [7] , et je mâapprêtais à entreprendre un long voyage, qui allait mâentraîner loin de chez moi pendant presque deux mois. La destination finale était la limite géographique extrême : lâAntarctique.
Au cours de ce voyage, jâavais prévu une halte en Argentine, pour un reportage sur la très grave crise économique qui étranglait alors ce pays dâAmérique latine, puis, sur le chemin du retour, un arrêt en Colombie, où je devais interviewer Ingrid Betancourt Pulecio, la femme politique et militante des droits de lâhomme colombienne. En fait, jâarrivai à Bogota quelques jours en avance. Et ce fut une chance â pour moi, du moins. Je rencontrai Ingrid Betancourt le 22 février, et, vingt-quatre heures après exactement, alors quâelle roulait vers Florencia, Ingrid Betancourt disparut sans laisser de traces, vers San Vicente del Caguan. Enlevée par les guérilleros des farc , elle fut leur otage pendant plus de six ans.