Keith Dixon - Actrice стр 17.

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Billie lui lança un regard étrange, puis alla chercher son manteau.

Dans la chambre, il y avait un texto dEric : Interview demain. Appelle pour convenirdelheure. Doigts croisés. Tarragon.

Elle ressortit ses vêtements paysans et les prépara pour le lendemain matin. Et elle prépara une explication pour la journaliste sans doute hyper hip-hop de Daily Paper, qui sattendrait à rencontrer une actrice portant la dernière création de mode. Mai devra probablement la convaincre que le chemisier était de Jonathan Anderson, même sil nétait pas assez large.

Elle savait davance que ça se passerait mal.

CHAPITRE SEPT

Après avoir peiné pour monter la colline, ils méritaient leur café. Geraldine sétait installée à une table pendant que Joan alla au comptoir. Elle revint avec deux cafés crème fumant dans une protection en carton. Elle marchait légèrement en diagonale, comme poussant un chariot de supermarché dont la roue est cassée, pour essayer de conforter son genou bancal.

Geraldine était excitée par le bruissement sonore de la station Brighton, comme toujours. Elle aimait bouger, voyager, lidée de se retrouver à un endroit pour un temps puis à un autre différent à peine une heure après.

Craig navait jamais compris cela. Il était son opposé un pantouflard devenu agité si bien quil nétait jamais relax où quil était. Voyager nétait que de largent dépensé pour être malheureux ailleurs. Bien que bien sûr malheureux fût son émotion favorite, la ritournelle répétée, la touche de retour à la position initiale, les deux lignes du niveau à bulle que sa petite bulle déquilibre cherchait constamment. Si je ne suis pas malheureux, je devrais lêtre, semblait être la mélodie. Il était mort dune crise cardiaque sur un terrain de golf, mais lattaque a été réalisée par un cœur qui était trop lourd pour lâme.

Elle navait pas pensé à Craig depuis presque une semaine presque un record. Cétait probablement parler à Mai qui la amené à repenser à lui. Le sucré qui relance la rage de dents.

Joan, une voisine aux larges hanches avec une envie presque pathologique de dépenser de largent, essayait dattirer son attention. Elle était parfois déférente à légard de Geraldine dune manière qui était énervante, mais au moins sa présence rendait les voyages moins solitaires.

- Dis-moi, la muette que pense Mai de la compétition ? Ce serait un rôle génial, non ? Deannah, je veux dire.

Geraldine reconnut létincelle dans les pupilles de Joan, la petite lumière de désir qui apparaissait dans le regard des personnes qui sapprochaient dune célébrité. Elle avait vu cela lui arriver, il y a des années, lorsque son visage était constamment sur les couvertures de magazines et les magazines de cinéma la façon dont les hommes et les femmes parfaitement ordinaires se rabaissaient, samoindrissaient, devenaient plus petits, plus effacés lorsquelle se trouvait dans leur orbite. En étant la mère de Mai, elle savait exactement comment cétait de se trouver au bout de la ligne dune telle auto-négation et avait fait de son mieux au cours des deux dernières années pour garder Mai attachée au sens de la banalité et du terre-à-terre.

- Cest une publicité, dit-elle. Cest une chose qui te poursuit sans que tu aies fait quoi que ce soit. Cest comme lorsque tu vas au cirque plusieurs manœuvres se déroulent en coulisses pour empêcher que les animaux et les clowns tombent de leurs vélos. Mais tu ne remarques jamais la manœuvre, pas vrai ? Cest ça la publicité une machine invisible qui dirige ton monde. Et tu ne la remarque jamais jusquau jour où elle tattaque. Ou te détruise.

Joan refusa dêtre distraite.

- Cest très bien présenté avec tes métaphores fantaisistes, jeune femme, mais tu nas pas vraiment répondu à ma question. Mai, veut-elle ou non du rôle ?

Geraldine la préférait ainsi, persévérante dans la poursuite des ragots, parce quelle était moins flatteuse.

- Jaime le rôle de la jeune femme, dit-elle. Tu peux lavouer. Maintenant, cétait quoi la question ?

Joan lui donna un petit coup sur le bras.

- Tu as quarante-cinq ans et tu es toujours magnifique. Moques-toi de moi comme tu veux, mais tu ne peux ignorer le fait que toi et Mai êtes la royauté pour certaines personnes.

Geraldine courba les coins de sa bouche.

- Quoi, moi et mes deux films ? Une demi-douzaine démissions de télé et deux longues séries dans West End ? Tu devrais sortir plus souvent, Joanie.

- Cest exactement pour cette raison quon est ici, aujourdhui, non ? Arrête maintenant de minsulter et bois ton café. On a cinq minutes.

La ligne de Brighton à Londres se déroulait par sa fenêtre tel un film quelle avait regardé une douzaine de fois. Elle essaya de repérer des changements dans le montage un nouveau lotissement à proximité de Haywards Heath, un rond-point rajouté au sud de East Croydon mais le paysage était resté tristement le même. Elle avait besoin de partir, daller au soleil, de prendre du temps juste pour elle et sans que le poids de Mai ne lui pèse sur les épaules. Mai ne lui avait jamais demandé son aide, pas même à lâge de seize ans. Mais Geraldine savait quelle en avait besoin. Elle était une jeune fille occupant un métier qui les redressait puis les écrasait. La nouveauté était tout, à moins que vous narriviez à prouver que vous aviez une chose différente. Un talent pour distraire, comme on dit. Mai avait du talent. Elle avait hérité quelque chose de ses parents et lavait recueillie en elle, digérée et ensuite utilisée pour créerquoi ? Qua-t-elle vraiment fait, et comment elle, sa mère, pourrait-elle le voir ? Elle aurait dû être aguerrie devant lexposition des sentiments de sa fille et se dire que rien naurait dimpact sur elle. Elle aurait dû voir tout cela, toutes les inflexions, chaque prétention à lenthousiasme ou au chagrin.

Mais Mai arrivait toujours à la surprendre. Elle avait lair davoir trouvé un point en elle où elle avait vu une chose, entendu une chose, ressenti quelque chose et ensuite découvert une façon de rendre cela visible dune nouvelle façon. Cétait ça le talent artistique. Cétait une chose que Geraldine navait jamais vraiment eu chez elle, cétait un mélange dapparences et un certain courage nerveux qui avait persuadé les gens quelle jouait. Avec Mai, cétait aussi difficile que si elle fût embarquée par une force étrangère pour devenir une personne différente. Une personne que même sa mère ne reconnaissait pas.

Clapham Junction, le dernier arrêt avant que le train navance péniblement en passant au-dessus de la rivière et quil arrive à Victoria, un autre brouhaha dacier et un million de bruit de pas.

- A quelle heure tu as rendez-vous avec elle ? demanda Joan en ramassant son manteau et son sac.

- Six heures. On a donc huit heures pour faire les boutiques jusquà labrutissement.

- Je vais à Oxford Street et les chevaux sauvages ne men empêcheront pas, à moins Dominic West chevauche lun deux.

- Jaurais pu me le faire.

La bouche de Joan souvrit mais elle se ressaisit à temps, se rendant compte quelle la taquinait à nouveau.

- Peuh. Dans tes rêves. Alors dis-moi, quest-ce que tu vas dire à Mai ?

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