Вальтер Скотт - Ivanhoe. 1. Le retour du croisé стр 3.

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Poursuivons cette comparaison un peu plus loin: Si notre néophyte, plein d'un nouvel amour de l'antiquité, entreprenait d'imiter ce que l'on vient de lui apprendre à admirer, s'il allait choisir dans le glossaire les vieux mots qu'il renferme, pour s'en servir à l'exclusion des autres, il faut convenir qu'il agirait bien à rebours. Ce fut l'erreur de l'infortuné Chatterton 12. Pour donner à son style une couleur antique, il rejeta toute expression moderne, et enfanta un dialecte différent de tous ceux qu'on eût jamais parlés dans la Grande-Bretagne. Celui qui voudra imiter l'ancien idiome avec succès s'attachera plutôt à son caractère grammatical, à ses tours de phrase, qu'à un choix laborieux de termes extraordinaires et surannés, qui, comme je l'ai déjà dit, ne sont, eu égard aux expressions encore en usage, que dans la proportion de un à dix, quoique peut-être un peu différens par le sens et par l'orthographe.

Ce que j'ai dit du langage s'applique bien plus encore aux sentimens et aux coutumes. Les passions, d'où les sentimens et les usages découlent avec toutes leurs modifications, sont généralement les mêmes dans tous les rangs, dans toutes les conditions, dans tous les pays et tous les siècles, et il s'ensuit naturellement que les opinions, les habitudes d'idées et les actions, bien que dominées par l'état particulier de la société, doivent en définitive présenter une ressemblance entre elles. Nos ancêtres n'étaient certainement pas plus différens de nous que les juifs ne le sont des chrétiens: ils avaient «des yeux, des mains, des organes, des sens, des affections, des passions, comme nous; ils étaient nourris des mêmes alimens, blessés des mêmes armes, sujets aux mêmes maladies, réchauffés par le même été et refroidis par le même hiver 13.» Leurs affections et leurs sentimens ont dû, par conséquent, se rapprocher des nôtres.

Ainsi, dans les matériaux que l'on peut faire entrer dans un ouvrage d'imagination tel que celui que j'ai essayé, l'auteur verra qu'une grande partie du langage et des moeurs serait aussi bien applicable au temps présent qu'à celui où se trouve le lieu des événemens qu'il raconte: la liberté du choix est donc plus grande pour lui, et la difficulté de sa tâche bien moindre qu'il ne le semblait d'abord. Pour emprunter une comparaison à un autre art, on peut dire des détails d'antiquités, qu'ils offrent les traits particuliers d'un paysage tracé par le pinceau. La tour féodale doit apparaître majestueusement; les figures mises en scène doivent se montrer avec le costume et le caractère de leur siècle; le tableau doit offrir les aspects particuliers du site avec ses rocs élevés ou la descente rapide de ses eaux en cascades. Le coloris général doit être aussi copié d'après la nature, le ciel être serein ou nébuleux, suivant le climat, et les nuances représenter celles qui dominent dans un paysage réel. Voilà les principales obligations que l'art impose au peintre; mais il n'est pas obligé de s'astreindre à copier servilement toutes les nuances peu importantes de la nature, ni de représenter avec une exactitude absolue les plantes, les fleurs et les arbres qui la décorent. Ces derniers objets, comme les teintes plus minutieuses de la lumière et de l'ombre, sont des attributs inhérens à toute perspective en général, analogues à chaque site, et mis à la disposition de l'artiste, qui ne suivra que son goût ou son caprice.

Il est vrai qu'en l'un et l'autre cas cette licence est resserrée dans de raisonnables limites. Le peintre ne doit introduire aucun ornement étranger à la contrée, au climat où il a mis son paysage. Il ne faut pas qu'il plante des cyprès sur l'Inch-Mervin 14, ni des sapins d'Écosse parmi les ruines de Persépolis. L'auteur se trouve assujéti à des lois identiques. Bien qu'il lui soit facultatif de peindre les passions et les sentimens avec plus de détail qu'il n'en existe dans les anciennes compositions qu'il imite, il faut qu'il n'introduise rien d'étranger aux moeurs du siècle; ses chevaliers, ses écuyers, ses varlets, ses hommes d'armes, peuvent être plus largement dessinés que dans les sèches et dures esquisses d'un ancien manuscrit enluminé; mais les costumes et les caractères doivent demeurer inviolables. Il faut que les figures soient les mêmes, mais tracées par un meilleur pinceau, ou, pour parler avec plus de modestie, exécutées dans un siècle où les principes de l'art sont mieux compris. Son langage ne doit pas être exclusivement suranné et inintelligible; mais on ne doit admettre, s'il est possible, aucun mot, aucune tournure de phrase qui trahirait une origine purement moderne. C'est une chose que d'employer l'idiome et les sentimens qui nous sont communs à nous et à nos ancêtres, et c'en est une autre de leur affecter des sentimens et un dialecte exclusivement propres à leurs descendans.

Voilà, mon cher ami, la partie la plus difficile de ma tâche; et, à vous parler franchement, je n'ose espérer de satisfaire votre jugement moins partial et votre science plus étendue, puisque j'ai eu de la peine à me contenter moi-même. Je sens d'ailleurs qu'on me trouvera encore plus défectueux touchant les moeurs et les costumes; ceux qui seront disposés à examiner rigoureusement mon histoire sous ce rapport voudront du moins, peut-être, me juger de la sorte. Il se pourra que j'aie introduit peu de choses qu'on eût droit d'appeler positivement modernes; mais, d'un autre côté, il est très probable que j'aurai confondu les usages de deux ou trois siècles, et introduit pendant le règne de Richard II des circonstances appropriées à une période plus ancienne ou plus voisine de nous. Ce qui me rassure, c'est que des erreurs de cette nature échapperont à la classe la plus nombreuse de mes lecteurs, et que je partagerai la gloire si peu méritée de ces architectes qui, dans leurs constructions gothico-modernes, ne balancent pas à introduire, sans règle ni méthode, les ornemens de différens styles et de différentes époques. Ceux à qui de plus vastes recherches ont donné les moyens d'être plus sévères seront sans doute plus indulgens, en proportion de la connaissance qu'ils auront des difficultés de ma tentative audacieuse. Mon digne ami Ingulphe, trop négligé, m'a fourni plus d'une indication utile; mais la lumière que nous offrent le moine de Croydon et Geoffroy de Vinsauff 15 est obscurcie par une telle masse de matériaux informes, que nous cherchons volontiers un refuge dans les intéressantes pages du brave Froissard 16, quoiqu'il ait fleuri à une époque bien plus éloignée de la date de notre histoire. Si donc, mon digne ami, vous êtes assez généreux pour excuser ma présomption d'avoir voulu me faire une couronne de ménestrel, en partie avec les perles de la pure antiquité, et en partie avec les pierres et la pâte de Bristol, au moyen desquelles on les imite, je nourris l'espérance que la difficulté de l'entreprise vous engagera, mon cher docteur, à en tolérer l'imperfection.

J'ai peu de chose à dire de mes matériaux: on peut les retrouver presque en entier dans le curieux manuscrit anglo-normand que sir Arthur Wardour conserve avec un soin si jaloux dans le troisième tiroir de son bureau de chêne, permettant à peine qu'on y regarde, et étant lui-même incapable de lire une syllabe de son contenu. Il ne m'eût jamais accordé la permission de consulter pendant quelques heures ces pages précieuses, dans mon voyage d'Écosse, si je n'avais promis de le désigner par quelque mode emphatique de caractère, comme, par exemple, le Manuscrit de Wardour, pour lui donner une individualité aussi importante que celle du Manuscrit de Bannatyne, du Manuscrit Auchinleck 17, ou de tout autre monument de la patience des tabellions gothiques. Je vous ai envoyé pour votre étude privée le sommaire des chapitres de cette pièce singulière, et je le joindrai peut-être, avec votre consentement, au deuxième volume de mon histoire, si le compositeur s'impatiente pour recevoir de la copie, lorsque tout mon manuscrit sera composé.

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