Конан-Дойль Артур - Micah Clarke Tome III. La Bataille de Sedgemoor стр 11.

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 À parler franchement, cela ne me tente guère, répondis-je. J'ai le caractère lent et solennel, et dans les scènes de cette sorte je ferais l'effet d'une tête de mort sur la table du festin.

Sir Gervas allait répondre quand tout à coup le silence de la nuit fut déchiré par un cri très long, perçant, qui fit frémir jusqu'aux dernières fibres de notre corps.

Jamais je n'entendis une clameur empreinte d'une pareille angoisse.

Nous arrêtâmes nos chevaux.

Nos hommes en firent autant derrière nous, et nous tendîmes l'oreille pour saisir quelque indice qui nous fit connaître de quel côté venait ce bruit.

Les uns étaient d'avis qu'il partait de notre droite et les autres que c'était de notre gauche.

Bientôt il retentit de nouveau, violent, aigu, comme un cri d'agonie.

C'était celui d'une femme qui expire dans la souffrance.

 C'est par ici, Major Hooker, cria Sir Gervas se dressant sur ses étriers et sondant les ténèbres du regard. Il y a une maison au delà des deux champs. J'aperçois une faible lumière, comme celle d'une fenêtre dont les volets seraient fermés.

 N'allons-nous pas y courir sans retard demandai-je avec impatience, car notre commandant restait impassible sur son cheval, comme s'il ne savait pas du tout quel parti prendre.

 Je suis ici, Capitaine Clarke, dit il, pour amener des vivres à l'armée, et je n'ai en aucune manière le droit de me détourner de mon trajet pour m'occuper d'autres incidents.

 Par la mort, mon homme! s'écria Sir Gervas. Il y a une femme en danger. Major, vous n'allez pas poursuivre votre route en la laissant appeler vainement au secours? Écoutez, c'est encore elle.

Et comme il parlait encore, le cri de détresse partit de nouveau de la maison isolée.

 Non, je ne peux en supporter davantage, m'écriai-je.

Mon sang bouillonnait dans mes veines.

 Major Hooker, allez exécuter vos ordres, mon ami et moi nous vous quitterons ici. Nous saurons justifier notre manière d'agir devant le Roi; venez, Sir Gervas.

 Remarquez-le, c'est bel et bien de la mutinerie, Capitaine Clarke. Vous êtes sous mes ordres, et si vous me quittez, ce sera à vos risques et périls.

 En pareille circonstance, je me soucie de tes ordres autant que d'un liard, répartis-je avec vivacité.

Faisant faire demi-tour à Covenant, je le lançai d'un coup d'éperon dans un sentier étroit, labouré d'ornière profonde qui conduisait à la maison, suivi de Sir Gervas et de deux ou trois soldats.

Au même instant, j'entendis Hooker donner un ordre d'un ton bref, et les roues grincer, ce qui me prouva qu'il ne comptait plus sur nous, et qu'il s'était remis en route pour accomplir sa mission.

 Il a raison, dit le baronnet pendant que nous suivions le sentier. Saxon ou tout autre vieux soldat, le louerait de son esprit de discipline.

 Il y a des choses qui l'emportent sur la discipline, dis-je à demi-voix. Il m'était impossible d'aller plus loin en abandonnant cette pauvre créature dans la détresse. Mais voyez, qu'est-ce que ceci?

En face de nous se dessinait une masse sombre.

En approchant, nous reconnûmes que c'étaient quatre chevaux attachés par la bride à la haie.

 Des chevaux de la cavalerie, Capitaine Clarke, s'écria un des soldats, qui avaient mis pied à terre pour les regarder de près. Ils portent la selle et les harnais du gouvernement. Voici une grille de bois. Elle ouvre sur un chemin qui aboutit à la maison.

 Alors il vaut mieux descendre, dit Sir Gervas en sautant à bas et attachant son cheval à côté des autres. Mes gars, restez près des chevaux, et si nous appelons, venez à notre aide. Sergent Holloway, vous pouvez nous accompagner. Prenez vos pistolets.

IV L'escrimeur à la jaquette brune

Le sergent, qui était un grand gaillard osseux des campagnes de l'ouest, poussa la grille, et nous suivions le sentier tortueux, quand un flot de lumière jaune jaillit par une porte ouverte tout à coup.

Nous vîmes alors une silhouette noire et trapue qui s'élança par là à l'intérieur.

Au même moment s'entendit un bruit assourdissant, confus, suivi de deux détonations de pistolet, et d'un vacarme de cris, d'haleines entrecoupées, d'un froissement d'épées, d'un orage de jurons.

Ce tapage subit nous fit hâter le pas vers la maison.

Nous jetâmes un coup d'œil par la porte ouverte et nous vîmes une scène, telle que je ne l'oublierai jamais, tant que ma vieille mémoire sera capable d'évoquer un tableau du passé.

La chambre était vaste et haute.

Aux solives brunies par la fumée étaient suspendues, comme c'est la coutume dans le comté de Somerset, de longues rangées de jambons et de viandes salées.

Une haute et noire horloge faisait tic-tac dans un angle.

Une table grossière, chargée de plats et d'assiettes comme pour un repas, occupait le milieu.

Juste en face de la porte brûlait un grand feu de fagots, et devant ce feu, chose horrible à voir, un homme était suspendu, la tête en bas, par une corde qui entourait ses chevilles, et qui, après avoir été passée dans un crochet d'une des solives du plafond, était maintenue par un anneau du plancher.

Ce malheureux, en se débattant, avait imprimé à la corde un mouvement de rotation, en sorte qu'il tournait devant le brasier comme un quartier de viande mise à rôtir.

En travers du seuil gisait une femme, celle dont les cris nous avaient attirés, mais sa figure rigide et son corps contracté montraient que notre aide était venu trop tard pour la soustraire au traitement qu'elle voyait prêt à fondre sur elle.

Tout près d'elle, gisaient l'un sur l'autre deux dragons au teint basané, vêtus de l'uniforme d'un rouge criard que portait l'armée royale, et jusque dans la mort, ils avaient gardé l'air sombre et plein de menace.

Au centre de la pièce deux autres dragons s'escrimaient d'estoc et de taille, avec leurs sabres contre un homme gros, court, aux larges épaules, vêtu d'une étoffe à côtes d'un tissu grossier, de couleur brune.

Il bondissait parmi les chaises, autour de la table tenant en main une longue rapière à coquille pleine, parant ou esquivant les coups avec une adresse merveilleuse, et de temps à autre mettant un coup de pointe au bon endroit.

Quoique serré de fort près, sa figure contractée, sa bouche ferme, l'éclat de ses yeux bien ouverts révélaient un caractère hardi.

En même temps, le sang qui coulait de la manche d'un de ses adversaires prouvait que la lutte n'était pas aussi inégale qu'elle le paraissait.

Au moment même où nous regardions, il fit un bond en arrière pour éviter une attaque à fond des soldats furieux, et d'un coup sec, rapide, lancé obliquement, il trancha la corde par laquelle la victime était suspendue.

Le corps tomba avec un bruit lourd, sur le sol de briques, pendant que le petit escrimeur ne tardait pas à recommencer sa danse dans un autre endroit de la chambre, sans cesser de parer ou d'esquiver, avec autant d'aisance et d'adresse, la grêle de coups qui tombaient sur lui.

Cette étrange scène nous tint quelques secondes dans une sorte d'immobilité magique, mais ce n'était pas le moment de s'attarder.

Une glissade, un faux pas, et le vaillant inconnu succombait fatalement.

Nous nous élançâmes dans la chambre, sabre en main, et fondîmes sur les dragons.

Devenus alors inférieurs en nombre, ils s'adossèrent dans un coin et frappèrent avec fureur.

Ils savaient qu'ils n'avaient pas de quartier à attendre après la besogne diabolique qu'ils avaient commencée.

Holloway, notre sergent de cavalerie, se portant furieusement en avant, s'exposa à un coup de pointe qui l'étendit mort sur le sol.

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