Конан-Дойль Артур - Micah Clarke Tome II. Le Capitaine Micah Clarke стр 9.

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Mais elles avaient été enlevées, et il ne restait plus d'autre indice des temps de troubles, qu'un monceau de piques et de hallebardes entassées dans un coin.

Au milieu de la chambre s'étendait une longue table massive, autour de laquelle étaient assis trente ou quarante personnes, pour la plupart des hommes.

Ils étaient tous debout à notre entrée.

À l'extrémité la plus éloignée de la table, un individu à figure grave débitait avec une prononciation traînante des actions de grâce qui n'en finissaient pas.

Cela commençait par une formule de reconnaissance, pour la nourriture, mais se perdait dans des histoires d'Église et d'État, pour finir par une supplication en faveur d'Israël, qui venait de prendre les armes pour livrer les batailles du Seigneur.

Pendant tout ce temps-là, nous formions un groupe près de la porte, nu-tête, et nous nous occupions à observer la compagnie et nous pouvions le faire de plus près que la politesse ne nous eût permis de le faire, si les gens n'avaient pas tenu les yeux baissés, et si leur pensée ne s'était pas portée ailleurs.

Il y en avait de tous les âges, depuis les barbons jusqu'aux jeunes garçons ayant à peine dépassé les dix-huit ans.

Tous avaient sur les traits la même expression austère et solennelle.

Tous étaient vêtus de la même façon, de costumes simples et sombres.

À part la blancheur de leurs larges cols et de leurs manches, pas un cordon de couleur n'égayait la triste sévérité de leur habillement.

Leurs vestes et leurs gilets noirs étaient de coupe droite et collante, et leurs souliers de cuir Cordoue, qui, au temps de notre jeunesse, étaient d'ordinaire l'endroit préféré pour quelques menus ornements, étaient tous, sans exception, à bouts carrés et attachés avec des cordons de couleur foncée.

La plupart portaient des baudriers simples en cuir non tanné, mais les armes elles-mêmes, ainsi que les larges chapeaux de feutres et les manteaux noirs, étaient entassés sur les bancs, ou déposés sur les sièges le long des murs.

Ils tenaient les mains jointes, la tête penchée et écoutaient cette allocution inopportune, en témoignant de temps à autre, par un gémissement ou une exclamation, de l'émotion que les paroles du prédicant excitaient en eux.

Les trop longues actions de grâces se terminèrent enfin.

La troupe s'assit et se mit sans autre retard ni cérémonie à attaquer les gros quartiers de viande qui fumaient devant elle.

Notre jeune hôtesse nous conduisit au bout de la table, où une haute chaise sculptée, pourvue d'un coussin noir, indiquait la place du maître de la maison.

Mistress Timewell s'assit à la droite du Maire, ayant à côté d'elle Sir Gervas et la place d'honneur, la gauche, étant donnée à Saxon.

À ma gauche était assis Lockarby, dont j'avais vu les yeux se fixer avec une admiration visible et persistante sur la jeune Puritaine depuis le premier instant où il l'avait aperçue.

La table n'étant pas très large, nous pouvions causer d'un bord à l'autre malgré le fracas de vaisselle et des plats, malgré l'affairement des domestiques et le grave bourdonnement des voix.

 C'est le personnel de la maison de mon père, fit remarquer notre hôtesse, s'adressant à Saxon. Il n'y a ici personne qui ne soit à son service. Il a un grand nombre d'apprentis dans le commerce de la laine. Nous sommes ici quarante à chaque repas, tous les jours de l'année.

 Et un repas fameux, dit Saxon, en jetant un regard sur la table, du saumon, des côtes de bœuf, des croupes de mouton, des pâtés de veau, qu'est-ce qu'un homme peut désirer de plus? De la bière brassée à la maison, servie en abondance, pour faire descendre tout cela. Si le digne Maître Timewell trouve le moyen d'approvisionner l'armée de cette façon, je serai le premier à lui en être reconnaissant. Une tasse d'eau sale, et un morceau de viande enfilé sur une baguette de fusil et charbonnée plutôt que rôtie au feu du bivouac, voilà probablement ce qui succédera à ces douceurs.

 Ne vaut-il pas mieux avoir la foi? dit la jeune Puritaine. Le Tout Puissant ne nourrira-t-il pas ses soldats, tout de même qu'Élisée fut nourri dans sa solitude et qu'Agar le fut dans le désert?

 Oui, dit un jeune homme à la tignasse frisée, au teint basané, qui était assis à la droite de Sir Gervas, il pourvoira à nos besoins, tout de même qu'un ruisseau jaillit des endroits secs, tout de même que les cailles et la manne tombèrent en abondance sur le sol stérile.

 Je l'espère bien, mon jeune monsieur, dit Saxon, mais il ne nous faudra pas moins organiser un service d'approvisionnement, avec une escorte de chariots numérotés, et un intendant pour chacun, à la façon allemande. Ce sont là choses qu'il ne faut point laisser au hasard.

À cette remarque, la jolie Mistress Timewell leva les yeux d'un air presque effaré, comme si elle en était scandalisée.

Ses pensées auraient pris la forme de paroles, si à ce moment même, son père n'était entré dans la salle, où toute la compagnie se leva et salua, pendant qu'il gagnait sa place.

 Asseyez-vous, mes amis, dit-il, en faisant un geste de la main Colonel Saxon, nous sommes des gens simples, et l'antique vertu du respect pour nos anciens n'est point entièrement éteinte chez nous. J'espère, Ruth, reprit-il que tu as pourvu aux besoins de nos hôtes?

Nous protestâmes d'une seule voix que nous n'avions jamais été l'objet d'autant d'attention et d'hospitalité.

 C'est bien, c'est bien, dit le bon tisseur de laine, mais vos assiettes sont nettes et vos verres vides. William, veillez à cela. Un bon travailleur sait toujours découper à table. Si un de mes apprentis n'arrive pas à faire plat net, je sais que je ne tirerai pas grand chose de lui quand il maniera l'outil à carder et le chardon à foulon. Les muscles et les nerfs se font avec des matériaux Une tranche de ce quartier de bœuf, William À propos de cette bataille d'Obergranstock, colonel, quel fut le rôle qu'y joua ce régiment de Pandous dans lequel vous aviez une commission?

Sur une question de ce genre, vous pouviez vous imaginer que Saxon avait bien des choses à dire.

Les deux hommes ne tardèrent pas à s'enfoncer dans une discussion animée où les incidents de la Dune de Roundway et de la bande de Marston furent mis en parallèle avec les résultats d'une vingtaine d'affaires aux noms impossibles à prononcer, dans les Alpes de Styrie et sur les bords du Danube.

Dans sa vaillante jeunesse, Maître Timewell avait commandé d'abord un escadron, puis un régiment, pendant les guerres du Parlement, depuis la bataille de Chalgrove jusqu'à la lutte finale à Worcester, en sorte que ces aventures militaires, sans avoir autant de diversité et d'étendue que celles de son interlocuteur, étaient suffisantes pour lui permettre de formuler et défendre des opinions précises.

Au fond, elles étaient les mêmes que celles du soldat de fortune, mais lorsque leurs idées différaient sur quelque détail, aussitôt s'engageait un feu croisé d'expressions militaires.

Il était tant question d'estacades, de palissades, de comparaisons entre la cavalerie légère et la grosse cavalerie, entre piquiers et mousquetaires, entre lansquenets et lanciers que l'oreille du profane était étourdie de ce torrent de mots.

Enfin, à propos d'un détail de fortification, le Maire traça le plan de ses ouvrages avancés avec des cuillers et des fourchettes, pendant que Saxon ouvrait ses parallèles avec des lignes de morceaux de pain, les poussait rapidement en traverses et chemins couverts, pour s'établir sur l'angle rentrant de la redoute du Maire.

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