Жорж Санд - Lavinia стр 8.

Шрифт
Фон

«Madame, disait-il, c'est trop longtemps feindre avec moi. Il est impossible que vous ne sachiez pas combien je vous aime, et je vous trouve cruelle de me traiter comme s'il s'agissait d'une de ces fantaisies qui naissent et meurent dans un jour. L'amour que j'ai pour vous est un sentiment de toute la vie; et si vous n'acceptez le voeu que je fais de vous consacrer la mienne, vous verrez, Madame, qu'un homme du monde peut perdre tout respect des convenances et se soustraire à l'empire de la froide raison. Oh! ne me réduisez pas au désespoir, ou craigne-en les effets.

 Vous voulez donc que je m'explique décidément? répondit Lavinia. Eh bien! je vais le faire. Savez-vous mon histoire, Monsieur?

 Oui, Madame, je sais tout; je sais qu'un misérable, que je regarde comme le dernier des hommes, vous a indignement trompée et délaissée. La compassion que votre infortune m'inspire ajoute à mon enthousiasme. Il n'y a que les grandes âmes qui soient condamnées à être victimes des hommes et de l'opinion.

 Eh bien! Monsieur reprit Lavinia, sachez que j'ai su profiter des rudes leçons de ma destinée; sachez qu'aujourd'hui je suis en garde contre mon propre coeur et contre celui d'autrui. Je sais qu'il n'est pas toujours au pouvoir de l'homme de tenir ses serments, et qu'il abuse aussitôt qu'il obtient. D'après cela, Monsieur, n'espérez pas me fléchir. Si vous parlez sérieusement, voici ma réponse: «Je suis invulnérable. Cette femme tant décriée pour l'erreur de sa jeunesse est entourée désormais d'un rempart plus solide que la vertu, la méfiance.»

 Ah! c'est que vous ne m'entendez pas, Madame, s'écria le comte en se jetant à ses genoux. Que je sois maudit si j'ai jamais eu la pensée de m'autoriser de vos malheurs pour espérer des sacrifices que votre fierté condamne

Êtes-vous bien sûr, en effet, de ne l'avoir eue jamais? dit Lavinia avec son triste sourire.

 Eh bien, je serai franc, dit M. de Morangy avec un accent de vérité où la manière du grand seigneur disparut entièrement. Peut-être l'ai-je eue avant de vous connaître, cette pensée que je repousse maintenant avec remords. Devant vous la feinte est impossible, Lavinia: vous subjuguez la volonté, vous anéantiriez la ruse, vous commandez le vénération. Oh! depuis que je sais ce que vous êtes, je jure que mon adoration a été digne de vous. Écoutez-moi, Madame, et laissez-moi à vos pieds attendre l'arrêt de ma vie. C'est par d'indissolubles serments que je veux vous dévouer tout mon avenir. C'est un nom honorable, j'ose le croire, et une brillante fortune, dont je ne suis pas vain, vous le savez, que je viens mettre à vos pieds, en même temps qu'une âme qui vous adore, un coeur qui ne bat que pour vous.

 C'est donc réellement un mariage que vous me proposez? dit lady Lavinia sans témoigner au comte une surprise injurieuse. Eh bien, Monsieur, je vous remercie de cette marque d'estime et d'attachement.»

Et elle lui tendit la main avec cordialité.

«Dieu de bonté! elle accepte! s'écria le comte en couvrant cette main de baisers.

 Non pas, Monsieur, dit Lavinia; je vous demande le temps de la réflexion.

 Hélas! mais puis-je espérer?

 Je ne sais pas; mais comptez sur ma reconnaissance. Adieu. Retournez au bal; je l'exige. J'y serai dans un instant.»

Le comte baisa le bord de son écharpe avec passion et sortit. Aussitôt qu'il eut refermé la porte, Lionel écarta tout à fait le rideau, s'apprêtant à recevoir de lady Blake l'autorisation de rentrer. Mais lady Blake était assise sur le sofa, le dos tourné à la fenêtre. Lionel vit sa figure se refléter dans la glace placée vis-à-vis d'eux. Ses yeux étaient fixés sur le parquet, son attitude morne et pensive. Plongée dans une profonde méditation, elle avait complètement oublié Lionel, et l'exclamation de surprise qui lui échappa lorsque celui-ci sauta au milieu de la chambre fut l'aveu ingénu de cette cruelle distraction.

Il était pâle de dépit; mais il se contint.

«Vous conviendrez, lui dit-il, que j'ai respecté vos nouvelles affections, Madame. Il m'a fallu un profond désintéressement pour m'entendre insulter à dessein peut-être. et pour rester impassible dans ma cachette.

 A dessein? répéta Lavinia en le fixant d'un air sévère. Qu'osez-vous penser de moi, Monsieur? Si ce sont là vos idées, sortez!

 Non, non, ce ne sont pas là mes idées, dit Lionel en marchant vers elle et en lui prenant le bras avec agitation. Ne faites pas attention à ce que je dis. Je suis fort troublé C'est qu'aussi vous avez bien compté sur ma raison en me faisant assister à une semblable scène.

 Sur votre raison, Lionel! Je ne comprends pas ce mot. Vous voulez dire que j'ai compté sur votre indifférence?

 Raillez-moi tant que vous voudrez, soyez cruelle, foulez-moi aux pieds! vous en avez le droit Mais je suis bien malheureux!»

Il était fortement ému. Lavinia crut ou feignit de croire qu'il jouait la comédie.

«Finissons-en, lui dit-elle en se levant. Vous auriez dû faire votre profit de ce que vous m'avez entendue répondre au comte de Morangy; et pourtant l'amour de cet homme ne m'offense pas Adieu, Lionel. Quittons-nous pour toujours, mais quittons-nous sans amertume. Voici votre portrait et vos lettres Allons, laissez ma main, il faut que je retourne au bal.

 Il faut que vous retourniez danser avec M. de Morangy, n'est-ce pas? dit Lionel en jetant son portrait avec colère et en le broyant de son talon.

Écoutez donc, dit Lavinia un peu pâle, mais calme, le comte de Morangy m'offre un rang et une haute réhabilitation dans le monde. L'alliance d'un vieux lord ne m'a jamais bien lavée de la tache cruelle qui couvre une femme délaissée. On sait qu'un vieillard reçoit toujours plus qu'il ne donne. Mais un homme jeune, riche, noble, envié, aimé des femmes c'est différent! Cela mérite qu'on y pense, Lionel; et je suis bien aise d'avoir jusqu'ici ménagé le comte. Je devinais depuis longtemps la loyauté de ses intentions.

 O femmes! la vanité ne meurt point en vous!» s'écria Lionel avec dépit lorsqu'elle fut partie.

Il alla rejoindre Henry à l'hôtellerie. Celui-ci l'attendait avec impatience.

«Damnation sur vous, Lionel! s'écria-t-il. Il y a une grande heure que je vous attends sur mes étriers. Comment! deux heures pour une semblable entrevue! Allons, en route! vous me raconterez cela chemin faisant.

 Bonsoir, Henry. Allez-vous-en dire à miss Margaret que le traversin qui est couché à ma place dans mon lit est au plus mal. Moi, je reste.

 Cieux et terre! qu'entends-je! s'écria Henry; vous ne voulez point aller à Luchon?

 J'irai une autre fois; je reste ici maintenant.

 Mais c'est impossible! Vous rêvez. Vous n'êtes point réconcilié avec lady Blake?

 Non pas, que je sache; tant s'en faut! Mais je suis fatigué, j'ai le spleen, j'ai une courbature. Je reste.»

Henry tombait des nues. Il épuisa toute son éloquence pour entraîner Lionel; mais ne pouvant y réussir, il descendit de cheval, et jetant la bride au palefrenier:

«Eh bien, s'il en est ainsi, je reste aussi, s'écria-t-il. La chose me paraît si plaisante que j'en veux être témoin jusqu'au bout. Au diable les amours de Bagnères et les projets de grande route! Mon digne ami sir Lionel Bridgemont me donne la comédie; je serai le spectateur assidu et palpitant de son drame.»

Lionel eût donné tout au monde pour se débarrasser de ce surveillant étourdi et goguenard; mais cela fut impossible.

«Puisque vous êtes déterminé à me suivre, lui dit-il, je vous préviens que je vais au bal.

Ваша оценка очень важна

0
Шрифт
Фон

Помогите Вашим друзьям узнать о библиотеке

Скачать книгу

Если нет возможности читать онлайн, скачайте книгу файлом для электронной книжки и читайте офлайн.

fb2.zip txt txt.zip rtf.zip a4.pdf a6.pdf mobi.prc epub ios.epub fb3

Похожие книги

Популярные книги автора