Flaubert Gustave - Trois Contes стр 3.

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Virginie l'occupait exclusivement; car elle eut, a la suite de son effroi, une affection nerveuse, et M. Poupart, le docteur, conseilla les bains de mer de Trouville.

Dans ce temps-la, ils n'etaient pas frequentes. Mme Aubain prit des renseignements, consulta Bourais, fit des preparatifs comme pour un long voyage.

Ses colis partirent la veille, dans la charrette de Liebard. Le lendemain, il amena deux chevaux dont l'un avait une selle de femme, munie d'un dossier de velours; et sur la croupe du second un manteau roule formait une maniere de siege. Mme Aubain y monta, derriere lui. Felicite se chargea de Virginie, et Paul enfourcha l'ane de M. Lechaptois, prete sous la condition d'en avoir grand soin.

La route etait si mauvaise que ses huit kilometres exigerent deux heures. Les chevaux enfoncaient jusqu'aux paturons dans la boue, et faisaient pour en sortir de brusques mouvements des hanches; ou bien ils butaient contre les ornieres; d'autres fois, il leur fallait sauter. La jument de Liebard, a de certains endroits, s'arretait tout a coup. Il attendait patiemment qu'elle se remit en marche; et il parlait des personnes dont les proprietes bordaient la route, ajoutant a leur histoire des reflexions morales. Ainsi, au milieu de Toucques, comme on passait sous des fenetres entourees de capucines, il dit, avec un haussement d'epaules: «En voila une, Mme Lehoussais, qui au lieu de prendre un jeune homme…» Felicite n'entendit pas le reste; les chevaux trottaient, l'ane galopait; tous enfilerent un sentier, une barriere tourna, deux garcons parurent, et l'on descendit devant le purin, sur le seuil meme de la porte.

La mere Liebard, en apercevant sa maitresse, prodigua les demonstrations de joie. Elle lui servit un dejeuner ou il y avait un aloyau, des tripes, du boudin, une fricassee de poulet, du cidre mousseux, une tarte aux compotes et des prunes a l'eau-de-vie, accompagnant le tout de politesses a Madame qui paraissait en meilleure sante, a Mademoiselle devenue «magnifique», a M. Paul singulierement «forci», sans oublier leurs grands-parents defunts que les Liebard avaient connus, etant au service de la famille depuis plusieurs generations. La ferme avait, comme eux, un caractere d'anciennete. Les poutrelles du plafond etaient vermoulues, les murailles noires de fumee, les carreaux gris de poussiere. Un dressoir en chene supportait toutes sortes d'ustensiles, des brocs, des assiettes, des ecuelles d'etain, des pieges a loup, des forces pour les moutons; une seringue enorme fit rire les enfants. Pas un arbre des trois cours qui n'eut des champignons a sa base, ou dans ses rameaux une touffe de gui. Le vent en avait jete bas plusieurs. Ils avaient repris par le milieu; et tous flechissaient sous la quantite de leurs pommes. Les toits de paille, pareils a du velours brun et inegaux d'epaisseur, resistaient aux plus fortes bourrasques. Cependant la charreterie tombait en ruine. Mme Aubain dit qu'elle aviserait, et commanda de reharnacher les betes.

On fut encore une demi-heure avant d'atteindre Trouville. La petite caravane mit pied a terre pour passer les

Une d'elles, un jour, aborda Felicite, qui peu de temps apres entra dans la chambre, toute joyeuse. Elle avait retrouve une s?ur; et Nastasie Barette, femme Leroux, apparut, tenant un nourrisson a sa poitrine, de la main droite un autre enfant, et a sa gauche un petit mousse les poings sur les hanches et le beret sur l'oreille.

Au bout d'un quart d'heure, Mme Aubain la congedia.

On les rencontrait toujours aux abords de la cuisine, ou dans les promenades que l'on faisait. Le mari ne se montrait pas.

Felicite se prit d'affection pour eux. Elle leur acheta une couverture, des chemises, un fourneau; evidemment ils l'exploitaient. Cette faiblesse agacait Mme Aubain, qui d'ailleurs n'aimait pas les familiarites du neveu, car il tutoyait son fils; et, comme Virginie toussait et que la saison n'etait plus bonne, elle revint a Pont-l'Eveque.

M. Bourais l'eclaira sur le choix d'un college. Celui de Caen passait pour le meilleur. Paul y fut envoye, et fit bravement ses adieux, satisfait d'aller vivre dans une maison ou il aurait des camarades.

Mme Aubain se resigna a l'eloignement de son fils, parce qu'il etait indispensable. Virginie y songea de moins en moins. Felicite regrettait son tapage. Mais une occupation vint la distraire; a partir de Noel, elle mena tous les jours la petite fille au catechisme.

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